L'Atelier de Brocéliande
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Le Lac du miroir aux fées

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Le Lac du miroir aux fées Empty Le Lac du miroir aux fées

Message par Amarante. Jeu 30 Mar - 12:28

Le Lac du miroir aux fées Le_lac10

Les sept fées du miroir aux fées

"On dit qu’il y a bien longtemps sur cette terre, les plantes, les bêtes, les hommes et tous les êtres du Petit peuple (fées, orcs, korrigans, géants…) vivaient en bonne intelligence, en harmonie même.

Mais les hommes, toujours entreprenants, défrichaient sans relâche pour étendre leurs cultures ; ils creusaient la terre pour en extraire la pierre, et puis le fer pour forger leurs outils, mais aussi leurs armes.

Alors, une nuit, tout le Petit Peuple s’est réuni. Longtemps ils ont parlé, et au matin tous devaient en convenir : « Etait venu le temps des hommes ». C’est à ce moment que les géants sont partis vivre dans les plus hautes montagnes du monde. Orcs et trolls ont fui vers les plaines enneigées du nord. Les korrigans, minuscules, n’ont eu qu’à se cacher dans les terriers et bosquets. Et les fées, elles ? C’est bien souvent dans l’eau des ruisseaux, des fontaines ou des lacs qu’elles ont trouvé refuge.

Il était alors sept fées, sept sœurs toutes jeunes puisque l’aînée avait à peine 350 ans. Elles aussi ont pris leur envol en quête d’un lieu où vivre à l’abri du regard des hommes. Elles ne sont pas allées bien loin, car au cœur de la forêt, elles ont découvert une vallée paisible, que seuls le cri des bêtes, le chant des oiseaux et le vif gargouillis du Rauco animaient. Au bout de la vallée, ce ruisseau s’évasait pour former un petit étang. C ‘est là qu’elles ont décidé de se retirer, et sous les eaux de l’étang elles ont bâti leur demeure. La maison terminée, elles se sont réunies et, levant chacune leur main droite, elles ont fait le serment solennel qu’à partir de ce jour plus jamais elles ne se montreraient aux hommes, jamais.

Et c’est ce qui s’est passé. Pour ne pas être surprises par les errances d’un bûcheron ou d’un promeneur, elles restaient tout le jour au fond de l’eau ; et ce n’est qu’à la nuit venue qu’elles sortaient prendre l’air, cueillir les herbes exigées par leurs magies, et pour apprendre encore. Car chacune avait sa spécialité, sa curiosité. L’aînée étudiait le pouvoir des plantes, l’autre lisait les étoiles dans la nuit, la troisième scrutait la roche, une autre parlait des heures durant à tous les êtres visibles ou invisibles, la cinquième se plongeait dans l’infiniment petit qui est en toute chose, la sixième cherchait dans l’eau quelques traces de la mémoire du monde… La septième, la plus jeune, était si vive et si curieuse qu’elle voulait tout connaître, tout savoir. Aussi, chaque soir, elle suivait l’une ou l’autre de ses sœurs et partageait chacun de leurs secrets. C’était donc aussi la plus puissante en magie.

Longtemps, elles vécurent tranquilles dans la vallée. Cent, deux cents, trois cents… mille ans ont passé sans que jamais aucun homme ne se doute de leur présence. Mais, au bout d’un millénaire, la plus jeune des fées autrefois si vivre devenait morose. Elle ne disait plus un mot. Elle s’ennuyait : tous les jours, enfermée. Souvent pour tromper l’ennui, elle se promenait étendue sur le dos, là, juste sous la surface de l’eau, profitant ainsi des rayons du soleil. Un jour qu’elle nageait ainsi entre deux eaux, elle entendit résonner un bruit inconnu. C’était comme un pas, très lourd, mêlant au son de la corne celui du métal raclant la roche. Et cela s’était arrêté au bord de l’étang. Alors, elle a filé jusqu’à la rive ; et là, juste au-dessus d’elle, elle a vu la tête d’un cheval qui s’abreuvait. Elle sa souri. Puis son petit cœur de fée s’est mis à battre, car là, juste au-dessus d’elle, un homme se penchait pour se rafraîchir. « Un homme ? pensa-t-elle. Mille ans qu’elle n’en avait pas croisé. » Que deviennent-ils ? Se font-ils encore la guerre ? Quelles nouvelles inventions géniales ? Qui règne sur le monde des hommes ? » Et il y a ce mystère, certaines fées prétendent : « Les hommes ont un étrange pouvoir. Ils ne sont pas magiciens, non. Et pourtant le plus humble d’entre eux peut tenir la plus puissante des fées à jamais prisonnière à ses côtés ».

Mille questions lui brûlent les lèvres… Et, bravant le serment, elle jaillit de l’onde et lui apparaît. Le jeune homme reste un moment bouche bée. Ebahi par tant de grâce et de beauté réunies, il est sous le charme. La fée, de son côté, le trouve bien de sa personne, sans doute un gentilhomme, habillé pour la chasse, il a fière allure. Tout le reste du jour elle va le questionner, parcourant avec lui toute la vallée, lui tâchant de lui répondre au mieux et toujours avec grande courtoisie. Le temps va filler et ce n’est qu’en fin d’après-midi qu’ils rejoignent l’étang. A cet instant, la jeune fée réalise : le soleil est déjà bas dans le ciel et la nuit va venir : « Tu ne dois pas rester là, va-t‘en vite ! » Et le jeune homme, docile, enfourche et talonne sa monture. Le regardant partir, la fée se ravise : « Attends ! Reviens demain, même heure, même lieu ! » D’un signe de la tête il lui répond. Bien sûr qu’il sera là demain. Il n’a plus qu’elle en tête. Alors elle retourne au fond de l’étang. Il était temps. Déjà ses sœurs s’apprêtent pour la nuit. Ses sœurs s’étonnent de la voir rentrer toute guillerette, chantonnant, embrassant le front de l’une, offrant une fleur de nénuphar à une autre. Elle semble soudain pleine de joie. Fatiguée par sa longue marche, la jeune fée s’allonge un instant. Fermant les yeux pour retrouver les images de ce jour, elle s’assoupit. « Il s’est passé quelque chose » pensent ensemble les six sœurs. Aussi, elles forment le cercle et de leurs magies conjuguées, elles lisent dans l’esprit de la cadette. Et elles découvrent l’horrible vérité : « Elle a rompu le serment et, de plus, a laissé cet homme repartir vivant. Il va prévenir les siens. C’en est fini de notre tranquillité. Il nous faut agir ! » Et, reformant le cercle, elles endorment la jeune fée pour tout un jour.

Le lendemain matin, le gentilhomme est de retour. Il a mis ses plus beaux habits et n’a qu’une hâte : la revoir. Mais ce n’est pas sa belle fée qui l’accueille. Sortant de l’ombre, jaillissant de l’eau, tombant des branches basses, ce sont les six sœurs qui se jettent sur le malheureux. Cinq d’entre elles le plaquent au sol, tandis que l’aînée, de ses mains, l’étrangle, le tue. Leur sale besogne accomplie, elles s’en retournent au fond de l’eau. Ce n’est qu’à l’extrême fin du jour que la jeune fée s’éveille. Tout de suite, à la lumière, elle réalise : le temps a filé, la nuit tombe déjà, son chevalier ! Elle court, elle nage –on ne sait trop- jusqu’à la berge et découvre le corps inanimé du jeune homme. C’est d’abord grande douleur, et, pour la première fois de son existence, des larmes emplissent ses yeux. Elle se penche et tend sa main vers le beau visage quand soudain elle aperçoit les traces des doigts meurtriers sur son cou. Après la douleur vient la colère, la terrible colère des fées. « Qui a fait ça ? » Elle n’a plus qu’une idée en tête venger la mort de cet innocent. Elle interroge les arbres, les oiseaux « Sui a fait ça ? » Effrayés, ils finissent par lui dire la vérité : « Ce sont tes sœurs. Mais toi seule es coupable, tu avais promis… » Mais déjà elle n’écoute plus. « Ce sont mes sœurs… » et, les yeux pleins de haine, elle retourne dans leur demeure sous les eaux, bien décidée à accomplir sa vengeance.

Cette nuit-là, l’étang va bouillonner, la terre va trembler, tout le val va gronder du vacarme du combat des fées. Au matin, tout est calme dans la vallée. Au fond de l’étang, la jeune fée se tient débout devant ses six sœurs pétrifiées, paralysées par sa puissance. Sans aucune pitié, elle saisit sa petite serpe et, une à une, elle les égorge. Oh, ce n’est pas par cruauté, non. Elle recueille un peu du sang de chacune dedans un bol, y mêle son propre sang et quelques plants de son secret. Ensuite, elle court auprès du corps du chevalier. Entrouvrant ses lèvres, elle verse la portion sanguine dans sa gorge. La poitrine du jeune homme se gonfle, puis ses yeux s’ouvrent à la vie. Alors elle l’embrasse, de toutes ses forces, elle le serre contre son cœur. Et elle décide d’abandonner ce lieu à jamais maudit, et d’aller vivre avec lui, femme parmi les hommes.

Et l’histoire pourrait s’arrêter là. Sans doute ils furent heureux. Sûrement, ils eurent beaucoup d’enfants. Mais là, au font de l’étang, sont six fées du Petit Peuple qui agonisent. Et de leur gorge, le sang va couler, couler, se mêlant aux eaux de l’étang qui va déborder et se répandre. Sept jours et sept nuits durant, le sang des fées, rampant tel un serpent, par delà les collines et les bois, inondant chaque village, chaque vallée sur des lieues à la ronde va marquer à jamais son passage. C’est pourquoi encore aujourd’hui en Brocéliande, la roche et la terre sont rouges, pourpres du sang des six fées de ce petit étang que l’on nomme le Miroir aux Fées.


*****

"Récit des enfants de l'école de Concoret librement adapté par Xavier Lesèche

Extrait de Contes et légendes de Brocéliande - Bibliothèque Celte- Anthologie présentée par le Carrefour de Trécélien - Terre de Brume Editions"


Dernière édition par Amarante. le Lun 25 Juil - 12:02, édité 1 fois
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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 17:21

Ys, la ville engloutie


La princesse Dahut voue un culte aux rites celtiques... et se permet quelques coupables fantaisies avec ses multiples amants. L'évêque de Quimper n'apprécie guère. Il saura punir la souveraine et son peuple.

****

En ce temps là, Gradlon le Grand, roi de Cornouaille, fit construire pour sa fille Dahut la merveilleuse cité d'Ys. Elevée plus bas que la mer, Ys en était protégée par une puissante digue. Une écluse fermait le port et seul Gradlon pouvait décider de son ouverture ou fermeture, permettant ainsi aux habitants d'aller pêcher.

La terrible et jeune Dahut, profondément attachée au culte des anciens dieux celtiques, accusait Corentin, évêque de Quimper, d'avoir rendu la ville triste et ennuyeuse. Elle rêvait d'une cité où seules règneraient richesse, liberté et joie de vivre.

Aussi, Dahut donna-t-elle à la ville un dragon qui s'empara de tous les navires marchands. Ainsi, la ville d'Ys devint la plus riche et la plus puissante de toutes les cités de Bretagne. Dahut y régnait en maîtresse absolue, gardienne de l'ancienne religion des Celtes. Chaque soir, elle faisait venir un nouvel amant au palais, l'obligeant à porter un masque de soie. Mais le masque était enchanté et, à l'aube, il se transformait en griffes de métal, tuant ainsi ses amants dont le corps était jeté du haut d'une falaise dans l'océan.Coup de foudre

Un beau matin, un prince, tout de rouge vêtu, arriva dans la cité. Dahut tomba aussitôt amoureuse de l'étranger. Or (il fallait s'en douter) c'était le diable que Dieu envoyait pour châtier la ville pécheresse. Par amour pour lui, elle lui donna la clé de l'écluse qu'elle déroba à son père pendant son sommeil. Le prince ouvrit l'écluse et l'océan en furie envahit la ville en déferlant dans les rues et étouffant ainsi les cris d'horreur des habitants

Seul, le roi Gradlon réussit à s'échapper de cet enfer avec l'aide de saint Gwenolé. Sur son cheval marin, il se mit à chevaucher péniblement dans les vagues, alourdi par un poids qui n'était autre que sa fille. Sommé par saint Gwenolé, il abandonna sa fille et parvint à regagner le rivage.

Aujourd'hui encore, il arrive que, par temps calme, les pêcheurs de Douarnenez entendent souvent sonner les cloches sous la mer et disent qu'un jour Ys renaîtra. Plus belle que jamais.


https://www.cote-o.fr/la-legende-de-ys-la-ville-engloutie/#:~:text=Selon%20la%20l%C3%A9gende%20de%20Ys%2C%20une%20tr%C3%A8s%20haute%20digue%20fut,tous%20les%20soirs%2C%20des%20orgies.
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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 17:32

L’arbre-Harpe Écosse

Il était une fois un fermier et une fermière qui vivaient dans un charmant vallon verdoyant,
avec un chien affectueux, un gentil chat, un cheval vigoureux, quatre vaches dans l’écurie, des
poules dans le poulailler et quelques canards barbotant sur la mare, c’était un couple travailleur
qui, sans être riche, avait de quoi de vivre à son aise. Ils étaient heureux ensemble, très épris l’un
de l’autre et, depuis longtemps auraient voulu partager leur bonheur avec un enfant, mais leur
vœu n’avait jamais été exaucé.
Par un beau soir, tandis que les fermiers terminaient leur labeur aux champs, leur attention
fut attirée par un jeune homme qui descendait de la montagne. Quand l’inconnu se rapprocha,
ils virent là le plus beau jouvenceau qu’ils eurent jamais vu. Grand mince et bien bâti, il arborait
une chevelure drue et ondulée, noire comme de la prunelle. Ses yeux bleus reflétaient le ciel d’été,
sa peau était blanche et fraîche. Malgré sa beauté, il n’était efféminé, mais plutôt robuste
d’allure. Il avait la grâce d’une danseuse et chantait la plus belle ballade qu’ait jamais entendue
le couple. Il accompagnait sa chanson sur une petite harpe portative dont les accords étaient
d’une infinie douceur.
Lorsqu’il arriva près des gens, il les salua avec courtoisie et leur dit que, venant de loin, il
serait reconnaissant d’un peu d’eau à boire. Enchantés par l’étranger, le fermier et la fermière
l’invitèrent à dîner et lui offrirent le gîte pour la nuit. L’inconnu accepta de bonne grâce
l’invitation et promit de récompenser leur gentillesse en chantant et jouant de la musique.
Pendant le repas, le jeune homme souligna le bonheur du fermier et de la fermière de vivre
dans un si merveilleux vallon, entourés de tant d’animaux et d’oiseaux. Le couple répondit
qu’en effet leur bonheur était immense, mais que l’un comme l’autre regrettait de n’avoir pas eu
d’enfant pour partager leur vie. Maintenant il «était trop tard, jamais ils ne connaîtraient le
plaisir et la joie de voir grandir un bambin et de le rendre heureux, protégé dans ce magnifique
vallon.

Choses promises, choses dues, le repas terminé et la table débarrassée, le bel inconnu prit sa
harpe, joua et chanta pour l’agrément de ses hôtes. C’était un tel enchantement qu’ils auraient
pu écouter sa musique une éternité durant. Enfin, le ménestrel posa sa harpe et chacun se retira
pour la nuit.
Lorsqu’arriva le matin et qu’ils se levèrent, le musicien était parti. Par terre, là où il avait
posé sa harpe, ils trouvèrent un berceau avec un petit bébé à l’intérieur et près de sa tête, un
papier contenant un message. Le mot disait que ce bébé était le leur et qu’il s’appelait Maïre,
l’inconnu ajoutait encore qu’un jour, il viendrait reprendre l’enfant...
Le fermier et la fermière étaient comblés par cet enfant et l’aimèrent de tout leur cœur. Plus
Maïre grandissait, plus elle devenait douce et belle comme l’églantine fraîche. Ses parents lui
témoignaient autant d’égards qu’ils en avaient l’un pour l’autre. Les habitants des vallées
alentour aimaient Maïre pour sa bonté, sa gentillesse et sa douceur.
Et Maïre chantait ! Déjà toute petite Maïre chantait ! Elle chantait pour les vaches quand
elle leur tirait du lait, et les vaches l’adoraient. Elle chantait pour le chat et le chien et le chat et
le chien adorait Maïre. Elle chantait pour les poules et les canards et les poules et les canards
adoraient Maïre. Elle chantait pour les oiseaux, les fleurs, les abeilles et les arbres, la mer et la
montagne, et tous ils adoraient Maïre.
Ainsi se passèrent dix-sept années. Les parents de Maïre l’aimaient tant qu’ils avaient oublié
le bel inconnu venu autrefois leur rendre visite dans le vallon. Mais un beau jour de printemps,
Maïre se mit à chanter une nouvelle chanson, une chanson que ses parents n’avaient jamais
entendue – ou plutôt si ! C’était la chanson que le harpeur avait modulé jadis – cette chanson
merveilleuse qui parlait de l’espoir, de l’amour, de la fidélité, du grand bonheur, et Maïre la
chanta alors souvent.
Par une belle journée de l’été qui suivit, tandis que tous trois marchaient dans les champs.
Maïre se mit à chantonner sa ballade enchanteresse. Aussitôt une autre voix se mit à l’unisson
de celle de Maïre. Alors ses parents se souvinrent avoir déjà entendus cette voix jadis, dix-sept
années auparavant. Ils surent ainsi que l’inconnue était venu rechercher Maïre, comme c’était
écrit dans le message. Ils eurent très peur et voulurent la cacher à l’inconnu, mais Maïre, en
entendant cette voix s’unir à la sienne, éprouva soudain une immense sensation de joie – elle qui
pourtant n’avait connu que le bonheur ! Elle n’avait jamais eue le cœur si léger et gai, et au
premier regard de l’inconnu, elle en tomba follement amoureuse. Alors elle sut qu’elle quitterait
son foyer sans regrets, ses amis, ses parents, tout pour suivre cet homme et être à lui à jamais.
Ses parents furent évidemment très malheureux à l’idée de la perdre, mais l’inconnu les avait
prévenus que ce jour fatal arriverait. Son père et sa mère savaient, quand ils regardaient Maïre,
qu’elle ne pourrait plus jamais connaître le bonheur séparée de cet homme. Alors, ils
l’embrassèrent tendrement et, en lui disant adieu, son père mit la main de sa fille dans celle du
visiteur.

L’inconnu prit doucement Maïre dans ses bras, à cet instant, elle devint harpe au son si
doux, la même qu’il portait jadis. L’homme caressa les cordes et tissa son chant merveilleux.
Tout en chantant, avec la harpe dans ses bras, si près de son cœur, ils se métamorphosèrent tous
les deux en un bel arbre.
De nos jours, l’arbre vit toujours. Les harpistes et les bardes de toute l’Écosse viennent
s’instruire sous ses branches et chanter la ballade de Maïre et du bel inconnu. On appelle cet
arbre l’Arbre-Harpe.
Conté par Norrey Loven, harpiste, d’après un récit de son grand-père :
Charles Dempster, de Banff (Nord-Est de l’Écosse)
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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 17:42

L’habit ne fait pas le Korrigan


Il est impensable pour un Korrigan de n’être que deux à table, le tête-à-tête se
terminant invariablement par une dispute ! Être au moins trois à table est donc conseillé.
S’il ne trouve aucun compère dans les environs pour faire le troisième convive, le Korrigan
a une astuce toute bête dont l’évidence laisse pantois dans sa simplicité : il trouve un
animal, d’écaille, de poil, ou de plume, peu importe, lui met de beaux habits et l’installe,
bon gré, mal gré, devant son couvert.
La conversation peut prendre alors des tournants fort surprenants dès lors qu’il s’agit
d’un geai ou d’une vipère, dont plus d’un connaît la réputation de commère. Si faute de
mieux, le troisième se trouve être une de ces grosses loches, du genre orange et mollasse, ce
sera grand dommage, car comme chacun sait, la limace est stupide, lente d’esprit et n’a
aucune conversation. Le repas risque alors de se révéler d’un morne ennui, à la limite du
soporifique.
Il peut arriver un jour que, au détour d’un chemin, vous fassiez l’étrange rencontre d’un
gros crapaud juché sur un caillou, portant culotte et chapeau mou, ou d’une pie sur une
branche affublée d’une redingote.

On sait très bien que, par nature, le Korrigan aime à se transformer. Aussi est-il
préférable de faire montre de politesse en donnant son bonjour à l’insolite animal. Il se peut
qu’il vous rende votre salut : au pire vous recevrez en réponse un croassement empreint de
fatalisme ou les jacasseries indignées d’une pie mécontente ! Il faut se dire que, une fois le
repas terminé et faisant preuve de ce bel esprit totalement farfelu qui les caractérise, les
Korrigans ont laissé les animaux en oubliant toutefois d’enlever leur défroque ! On peut
alors parfaitement comprendre le désarroi dans lequel sont plongées ces pauvres bêtes.

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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 17:44

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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 17:57

Anne, la petite fée aux roses

Néant !...
Quel nom pour un village !...

Et pourtant, il existe bien et il n’a nullement l’intention de s’abimer dans les eaux de l’Yvel ou de se volatiliser dans les vents de Brocéliande.

Il est vrai que dans la langue bretonne, ce mot veut dire « ciel ».
C’est bien une histoire du Ciel qui s’y déroula il y a fort longtemps.

Dans un château aux tours crénelées, le château du Bois de la Roche, vivait un méchant homme et une délicieuse petite fille. Le méchant homme s’appelait Messire de Volvire. Et sa fille, Anne.

Cette année là sévit une grande sécheresse. les innombrables pauvres furent plus pauvres encore. Nombreux furent ceux qui moururent de faim. Chaque jour sonnait le glas des trépassés.

— Encore un se lamentait-on, qui n’aura plus jamais faim !

Devant cette misère, Messire de Volvire demeurait insensible. Ses greniers débordaient de blé. Dans son cellier, peu de barriques résonnaient. Quant à son or, il remplissait sept grands coffres. De quoi nourrir les bretons durant une année entière.

Mais malheur à l’affamé qui venait implorer la pitié du châtelain du Bois de la Roche !... Il était roué de coups et jeté dans les douves où, souvent, il terminait sa misérable existence.

Mais près de la haine germait l’amour.
Près du péché fleurissait la vertu.
Près du monstre s’épanouissait une délicieuse enfant.

Anne avait alors 14 ans. Ses cheveux blonds comme les blés de l’Armorique, ses yeux bleus comme les eaux de la « petite mer », son teint frais et rose comme la bruyère de la lande, plongeait tout le brave monde dans le ravissement.

— Qu’elle est belle, notre petite maitresse et qu’elle est bonne !...

Anne, en effet, ne pouvait voir pleurer sans pleurer, souffrir sans souffrir... Son cœur était profond comme ses yeux.

Hélas, Messire de Volvire ne pouvait tolérer que sa fille ne fût à son image. On dit qu’il la fouetta jusqu’au sang, un jour qu’il la vit sourire à une bergère de son âge. Peut-être l’eût-il égorgé un soir de la triste année si...

Et c’est ici que le Ciel vint visiter la terre. Anne entendit des bruits dans la cour d’honneur, c’était les valets qui chassaient une femme et ses deux enfants :

— Pas de manants dans ces lieux ! hurlaient-ils

— Que se passe-t-il ? interrogea rudement Messire de Volvire.

Anne de répondre :

— Mais père, ce sont les valets qui se chamaillent.

— Sale vermine, rugit de Volvire, vous aurez du fouet à mon départ pour la chasse !

Et il chaussa ses bottes.
Mais Anne avait disparu.
Dans la cuisine, elle remplissait son tablier de miches odorantes sous le regard débonnaire du maitre queux.

— Maitresse, si votre père vous voyait !

— Je le sais, mon bon Bertrand. Il me tuerait... Mais je ne puis les laisser partir ainsi...

Et Anne se précipita dans la cour.
Il était temps. La lourde porte se refermait sur la femme et sur ses enfants.
A la vue de la petite fée de Brocéliande, les valets cessèrent de crier et les malheureux d’implorer.

Anne s’avançait, évangélique et souriante.
Des mains décharnées se tendirent, les miches furent reçues avec la même ferveur que la sainte hostie.

C’est alors qu’apparut, le faucon au poing, Messire de Volvire.
Il avait tout vu.
Sa colère allait se déchainer. Elle serait démentielle.

Mais tout à coup, il se mit à sourire. Dans les mains de la femme et de ses enfants, dans le tablier de sa fille il ne voyait plus que des roses. Oui, des roses.

Par ce beau soir d’automne, il retrouva son cœur d’homme et Anne la liberté de faire le bien au grand soleil de Dieu.



Un conte inspiré par la jeunesse d’Anne de Volvire
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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 18:00

Lutins du moulin de la Hâtaie

Qu’avait-il donc fait aux farfadets, aux korrigans, aux poulpiquets, Jean-Louis, le meunier du moulin de la Hâtaie, pour que ces méchants petits êtres lui aient un jour voulu malemort ? Il n’aurait su le dire lui-même.

Jusqu’à ce moment, il n’y avait pas eu d’homme plus heureux. Tandis que le clair soleil allumait des reflets d’or à la surface de l’étang et que les belles tours du château voisin se miraient dans le miroir des eaux, il n’avait qu’à se promener, les mains dans les poches, en rêvant aux étoiles ou à taquiner le goujon. Son moulin besognait pour lui.

Le brave serviteur ne boudait d’ailleurs pas à la peine. Jour et nuit, ses roues tournaient, éclaboussant ses vieux murs de paillettes de cristal, et l’on entendait le toc-toc de la meule qui gémissait sous l’effort, en broyant le grain. La vue de ce bonheur avait-elle excité la jalousie des lutins ? Peut-être bien. Toujours est-il qu’ils s’y prirent de singulière façon pour le troubler.

Il y avait dans le château de la Hâtaie, du côté qui regardait le moulin, une tour solitaire qui était inhabitée depuis longtemps, parce que disait-on, elle était hantée. Ce fut là que la troupe échevelée et bruyante des lutins alla s’installer. Pauvre Jean-Louis ! À dater de ce jour, il ne connut plus le repos. Adieu la douce vie d’autrefois ! Il était en alerte perpétuelle.

Sitôt que le soleil avait disparu et que la nuit avait commencé à envelopper de ses ombres la surface de l’étang, réveillant, parmi les glaïeuls et les nénuphars, les coassements des grenouilles, les vilains petits êtres s’élançaient, tel un essaim de frelons malfaisants, et fondaient sur le moulin. On les entendait venir de loin. On aurait dit une armée de diablotins en marche. Leurs voix débordantes et aigrettes rappelaient celles des enfants en colère. Ils chantaient, mais leurs chants étaient une cacophonie infernale capable d’épouvanter les morts dans leurs sépulcres. Pour narguer Jean-Louis, ils répétaient à tue-tête la chanson.

Meunier tu dors, ton moulin,
Ton moulin va trop vite ;
Meunier tu dors, ton moulin,
Ton moulin va trop fort.
Ton moulin, ton moulin va trop vite,
Ton moulin, ton moulin va trop fort.

Ah non ! il ne dormait guère, Jean-Louis, et son moulin n’allait pas fort non plus. À peine étaient-ils là que les roues ne tournaient plus ou qu’elles tournaient mal. Bientôt, la maison en était pleine. Il y en avait partout de ces méchants petits bonshommes, sur les chaises, sur les bancs, sur la table, sur le foyer, dans les lits, jusque dans la marmite et la baratte à beurre et il en arrivait sans cesse d’autres. Quand la troupe était au complet, ils se mettaient à danser, en se tenant par leurs mains crochues, leurs longues barbes balayant la terre, et c’était toujours le même refrain qu’ils reprenaient en chœur :

Par-dessus haies et buissons,
Nous dansons des rigodons,
Et ce que nous défaisons,
Meunier, nous le refaisons.

Ce disant, d’ailleurs, ils ne mentaient pas, les vilains. Personne ne s’entendait mieux à faire et à défaire. Si Jean-Louis levait la vanne, afin de laisser couler l’eau sur les roues, vite, il se précipitaient après lui, et s’accrochant à la planche, ils tiraient en haut, tiraient en bas ainsi que des scieurs de long qui font aller leur outil, et les roues ne tournaient plus que par saccades.

Si Jean-Louis arrêtait sa meule pour la piquer, eux ils la remettait en travail, en lui imprimant des mouvements fantastiques, capables de la briser. Dans de telles conditions, on juge si les clients avaient lieu d’être contents. Lorsqu’ils ouvraient leurs sacs, il y retrouvaient moitié grain, moitié farine. Un dernier méfait des lutins acheva d’exaspérer Jean-Louis et le décida à user des grands moyens.

Il avait reçu ce jour là des pochées (des sacs) de froment, à ne savoir où les loger, et déjà, il se frottait les mains d’aise : « Bonne affaire, se disait-il ; j’ai là de la besogne pour plusieurs mois et, grâce à Dieu, il sera possible au meunier de la Hâtaie de renouveler son vestiaire l’hiver prochain. » L’affaire était bonne, assurément, mais il avait compté sans ses hôtes. Le soir même, korrigans, farfadets et poulpiquets envahissaient le moulin, plus nombreux que jamais. « Ah ! Ah ! s’écrièrent-ils, le meunier a trouvé la fortune. Il doit être content. Nous voulons être de la fête.

Alors commença une singulière procession. Chacun des lutins s’empara d’un sac, et les uns derrières les autres, ils se mirent à déambuler autour du moulin et le long de l’étang, jusqu’au château. On aurait dit une multitude de fourmis se promenant autour de leur nid, un gros œuf entre les pattes. Cela dura de la sorte jusqu’à l’aube. Jean-Louis se désolait. Cette fois il était sûrement ruiné. Il ne reverrait plus son grain.

Or, au premier chant du coq, tout était rentré. Les sacs avaient repris leur place et les lutins avaient disparu. Ils avaient voulu simplement montrer de nouveau qu’ils savaient faire et défaire à leur fantaisie.

Le meunier voulut montrer lui aussi qu’il entendait être le maître désormais chez lui et demanda conseil aux gens avisés. Il y avait en ce temps là, au bourg de Guer, une vieille femme, Guillemette Gicquel, un peu sainte, un peu sorcière, qui en savait sur le petit doigt plus long que plusieurs notaires et qui aimait à tirer le pauvre monde de peine. « Pourquoi ne vas-tu pas la voir ? lui dit un mendiant qui sollicitait un morceau de pain à sa porte. Il y a longtemps qu’elle t’aurait indiqué la recette pour te débarrasser de ces vilains bonshommes. » Il alla trouver Guillemette Gicquel. Oui bien sûr, mon bon Jean-Louis, lui répondit la vieille, je serais heureuse si je puis te mettre à l’abri des tours de ces ennemis d’un nouveau genre ; mais, une première question : Comment entrent-ils dans ta maison ?

— Ils y entrent, répliqua le meunier, par la porte, par les fenêtres, par la cheminée, par toutes les ouvertures qu’ils rencontrent et en répétant une chanson, toujours la même. Ah ! je la connais leur chanson ! L’ai-je assez souvent entendue !

Par-dessus haies et buissons,
Nous dansons des rigodons,
Et ce que nous défaisons,
Meunier, nous le refaisons.

La vieille se frappa le front : J’ai trouvé ! s’écria-t-elle. Les malins aiment à refaire ce qu’ils ont défait. Donne leur donc un travail où le diable perdrait son latin.

— Je mettrais à brûler un cierge de deux écus devant la statue de messire saint Gurval, patron de cette paroisse, repartit Jean-Louis, et à vous, la mère, je donnerais deux sacs de pure farine de froment si je réussis à les embarrasser.

— La chose mon gars n’est pas si difficile que tu le crois, reprit Guillemette. Écoute-moi bien : lorsque, à la tombée de la nuit, tu lèveras la vanne de ton moulin, aie soin de poser en travers un sac plein de son. Retire-toi ensuite et attends. Tu viendras demain m’apporter des nouvelles de tes bonshommes.

Jean-Louis suivit le conseil. Aux premières ténèbres, il remonta sa vanne, plaça auprès, en équilibre, un sac de son et se retira. Il avait à peine fermé la porte de son moulin que le refrain habituel : « Par-dessus haies et buissons... » lui annonça au loin l’arrivée des lutins.

— Oui, oui, chantez toujours, les malins, murmura-t-il. On verra bien qui chantera le dernier. À mon tour de rire à présent. Ce fut son tour en effet. Il n’y avait pas une minute que la troupe des petits bonshommes malfaisants était sur la chaussée qu’un affreux concert de vociférations s’élevait parmi eux. Tous criaient à la fois, se disputant et se battant, et il y avait motif. L’un deux venait de s’accrocher à la vanne pour l’abaisser et la remonter, suivant leur habitude, et, dans sa précipitation, il n’avait pas pris garde au sac. Or, voilà que celui-ci était allé choir dans l’étang et aussitôt le son s’était répandu à la surface de l’eau.

Il s’agissait maintenant de ramasser ce son, puisque les lutins prétendaient faire ce qu’ils avaient défait ; mais pensez si c’était facile. Ils avaient beau plonger et replonger, s’efforcer de saisir cette poussière de froment qui flottait de tous côtés, peine inutile.

Jean-Louis était accouru, et, les poings sur les hanches, riant à gorge déployée, il les encourageait à la besogne : « Voyons ! voyons ! les gars, criait-il, ça ne va donc plus ! Du cœur à l’ouvrage, que diable ! J’ai besoin de mon son. Je ne l’ai pas mis sur ma vanne pour le jeter aux poissons. Il me le faut céans ». Rien n’y faisait. Au bout de dix minutes, le son avait disparu au fond de l’étang ou partait à la dérive avec le torrent qui cascadait sur les roues du moulin.

Les petits hommes, mouillés, transis, toussant, pleurant, pris de douleurs et de rhumatismes et n’en pouvant plus s’en allaient eux aussi, honteux d’avoir été vaincus par un meunier. Ils emportaient un au revoir malicieux de celui-ci. Pour petits qu’ils sont, les lutins ne sont pas moins d’orgueilleux personnages. Ils se croient supérieurs aux hommes par l’esprit et jamais ils ne se montrent, là où ils croient trouver leur maître. Voilà pourquoi jamais ils n’ont reparu à la Hâtaie.

Bien des années se sont passées depuis ceci et beaucoup de choses ont changé. Seul, le beau château survit avec son donjon, sa cour d’honneur, ses fossés, ses cachettes qui servaient d’asile à de malheureux prêtres pendant la Révolution. La tour où nichait les lutins a été supprimée ; l’étang s’est changé en prairie ; le moulin n’est plus qu’une ruine et Jean-Louis est parti chez le bon Dieu.

Le souvenir des méchants petits êtres n’en a pas disparu pour cela de Guer. Volontiers, de braves gens racontent encore leurs méfaits et la façon dont le meunier de la Hâtaie eut raison d’eux. Leur aventure prouve une chose, c’est qu’en ce monde il n’est malin qui ne rencontre un jour plus malin que lui.




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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 18:04

Vieux loup de Brocéliande

Dans la forêt de Brocéliande, il ne restait plus qu’un seul loup, un vieux loup, mais qui courait encore bien.

Ce vieux loup s’ennuyait un peu, heureusement qu’il avait un bon copain : un escargot bien malin qui se méfiait de ses grosses pattes et préférait grimper sur une branche. De temps en temps, le loup venait lui rendre visite et bavarder un peu avec lui. Un jour, le loup dit à l’escargot :

— Je voudrais bien faire une course avec toi. Je cours plus vite et je serai sûrement rendu le premier.

— Chiche, dit l’escargot, demain si tu veux !

Ils fixèrent donc le départ et le chemin devrait être long car le loup avait décidé de se rendre au château de Comper. Il se disait : je vais remplir ma panse, car les rois laissent souvent la table garnie. Je serai sûrement rendu bien avant lui et je pourrai me satisfaire ! Le loup était très fier et voulait partir le premier.

— Je veux bien, dit l’escargot, mais laisse moi donner le départ !

— D’accord, répondit le loup.

— Un, dit l’escargot pendant qu’il grimpait sur la queue du loup,

— Deux, et il se blottit dans la queue touffue du loup,

— Trois, et les voilà partis.

Le loup courait ventre à terre. Il avait chaud et soif ; il s’arrêta à une mare et se désaltéra, puis repartit sans se retourner. Arrivé à Comper, le château était fermé ; alors, il s’est assis pour reprendre son souffle. L’escargot en profita pour descendre et grimper le long de la fenêtre qui n’était pas fermée entièrement. Il y avait une toute petite fente et l’escargot s’y glissa, puis frappa au carreau. Le loup l’aperçut et lui dit :

— Que fais-tu là ?

— Moi, dit l’escargot, je t’attendais depuis presque une heure !

Le loup est parti la tête basse et la queue entre les jambes. Il a couru pour aller se cacher, mais comme il était vieux, son cœur n’a pas résisté et il est mort. Depuis ce temps là, il n’y a plus de loup dans la forêt de Brocéliande


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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 18:06

Château de Brocéliande


Il habitait Brignac. On l’appelait « Jean de la barre de fer ». Il avait une force telle qu’en revenant de la forge où il était compagnon, il faisait tournoyer comme un tambour-major, une barre de fer de cent kilogrammes.

Il habitait Saint-Léry. On ne l’appelait que « Jean des Meules ». Il avait une force telle qu’il jouait au palet avec les meules de son moulin.

Il habitait Tréhorenteuc. On ne l’appelait que « Jean du Rocher ». Il avait une force telle qu’il soulevait à bout de bras le menhir du Val sans Retour.

Le jour du pardon de Sainte-Anne-de-Beuve, les trois Jean décidèrent de partir ensemble à l’aventure. À cette époque, la forêt de Brocéliande couvrait presque la moitié de l’Armorique. C’était la forêt vierge des celtes, la forêt des découvertes et des mystères... Les trois Jean décidèrent de l’arpenter, là ils connurent plus d’aventures et de complots que les Chevaliers de la Table Ronde. Oyez plutôt ce qui suit.

Après avoir parcouru d’innombrables lieues, ils découvrirent une vaste clairière dans laquelle se dressait un château aux tours d’argent et aux portes d’or. Ils pénétrèrent sans frapper, comme cela se faisait au bon vieux temps , dans le riche palais.

« Jean de la Barre de fer » cria : Eh ! eh ! ...
« Jean des Meules » cria : Oh ! oh ! ...
« Jean du Rocher » cria : Ah ! ah ! ...

Mais personne ne vint. Les huches de la cuisine débordaient de victuailles. Les lits étaient garnis de draps bien blancs sentant bon la lessive. Sur la table sans fin de la salle à manger, le couvert était dressé. Surpris par le silence des lieux, nos trois Jean attendirent vainement qu’un être humain se présentât. Le château avait perdu ses hôtes. Alors la faim les prit. Jean du Rocher s’en fut à la cuisine et ses compagnons s’attablèrent. C’est par la monumentale cheminée que descendit le korrigan. Jean du Rocher attisait le feu sous la marmite.

et le korrigan de dire : — Qu’il fait froid chez vous !
Et Jean du Rocher de répondre : — Chauffe-toi mon petit bonhomme !
Et le petit bonhomme au lieu de se chauffer cracha dans la marmite.

Jean du Rocher vit rouge et voulut se saisir du méchant korrigan. Hélas ! Comme tout korrigan, fils de Satan, le petit bonhomme fut plus fort que le géant. Jean du Rocher se trouva jeté, roulé, tassé entre deux huches monumentales. Ce furent ses compagnons, étonnés de ne pas le voir venir, qui le délivrèrent de cette situation.

Mais il n’avoua pas ce qui lui était arrivé.
— Je mes suis coincé ainsi en voulant quérir du pain, expliqua-t-il.

Il proposa à Jean des Meules de veiller à son tour sur la potée. Et le korrigan redescendit.

et le korrigan de dire : — Qu’il fait froid chez vous !
Et Jean des Meules de répondre : — Chauffe-toi mon petit bonhomme !
Et le petit bonhomme jeta cette fois une poignée de cendres dans la marmite.

Jean des Meules vit rouge. Il voulut se saisir du méchant korrigan. Mais celui-ci, fils du Diable, fut encore plus fort que le géant. Jean des Meules se trouva jeté, roulé, tassé entre deux charniers. C’est dans cette position que le découvrirent ses deux compagnons.

— C’est en voulant quérir du petit salé que je me suis coincé....

Jean de la Barre de fer ne le crut pas. Il flaira Lucifer et fit un grand signe de croix. Alors, nos trois Jean entendirent un vacarme sans nom. Ils se trouvèrent au milieu de la clairière, mais le château avait disparu. Ils comprirent alors que les châteaux sans hommes, les pains sans boulangers et les blés sans paysans, n’étaient que des inventions du Diable.



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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 18:08

Trois Jean de Brocéliande


Ce conte commence précisément à Brignac. Il y avait à cette époque, dans la commune de Brignac, un jeune homme si fort et vigoureux que toutes les jeunes filles du pays de Mauron n’avaient d’yeux que pour lui. Il était apprenti forgeron et faisait entre ses doigts tournoyer une barre de fer de plus de cent kilos.

Aussi, un jour, décida-t-il de s’en aller de par le monde en quête d’aventures. Mais son bâton de cent kilos ne lui suffisait pas. Il demanda à son patron de lui en fabriquer un qui soit digne de son nom « Jean des Fers ». Pendant plus d’une semaine, le forgeron fondit l’acier pour confectionner un bâton digne de notre homme. C’est avec joie que le maitre forgeron vit son apprenti satisfait car il ne lui restait presque plus d’acier à fondre.

C’est par un matin d’hiver, alors que la lune était encore haute dans le ciel, que Jean des Fers prit la direction de Brocéliande. Après plusieurs heures de marche, il arriva en vue de Saint-Léry. Il fut étonné par un bûcheron qui portait seul plusieurs arbres à la fois.

— Quel est ton nom ?
— L’on m’appelle Jean des Arbres.
— Te plairait-il de parcourir le monde avec moi ?
— Ma foi, pourquoi pas. Je commence à m’ennuyer par ici.

Il emporta avec lui quelques arbres, les plus beaux et les plus gros qu’il trouva et se mit en route avec Jean des Fers. Après avoir cheminé quelques temps, ils arrivèrent à Tréhorenteuc où leur passage en surprit plus d’un. Arrivés au Moulin de la Vallée, à proximité du miroir des Fées, ils furent tout surpris de voir le meunier occupé à jouer au palet avec les meules de son moulin.

Bigre, dirent-ils, voila un singulier personnage et l’interpellèrent.
— Quel est ton nom ?
— Je m’appelle Jean des Meules.
— Et te plairait-il de parcourir le monde avec nous ?
— Ma foi, bien volontiers, la récolte de cette année à été bien mauvaise et n’ayant plus de blé à moudre, je m’occupe comme je peux.

C’est ainsi que nos trois Jean « des Fers, des Arbres et des Meules » s’enfoncèrent dans la forêt de Brocéliande, en espérant y trouver de quoi satisfaire leur soif d’aventures.

Et après avoir marché plusieurs heures, ils se trouvèrent au bord d’un large étang. « En faire le tour nous ferait perdre du temps » dit Jean des Arbres et jetant ses arbres, il fit un pont pour traverser cette pièce d’eau.

Après avoir marché pendant trois jours, ils arrivèrent soudain au détour d’une clairière devant un immense château abandonné. Comme la nuit commençait à tomber, ils décidèrent d’y dormir. Quelle ne fut pas leur surprise de trouver à l’intérieur du château des lits qui semblaient les attendre. Hormis le bruit des chauves-souris et des chouettes, ils passèrent une excellente nuit.

Et maintenant, à nous la vie de château » dit Jean des Fers en se levant d’un air joyeux. Déjà, Jean des Arbres avait fait l’inventaire des cuisines et revint tout joyeux.

— Vous pouvez aller vous distraire à la chasse si vous voulez, Moi, je m’occupe de la cuisine, lorsqu’il sera midi, je sonnerai la cloche.

Jean des Fers et Jean des Meules s’en allèrent ainsi en promettant à Jean des Arbres de ramener un sanglier ou quelque autre gibier. Et alors qu’ils étaient occupés à courir un sanglier de forte taille, Jean des Arbres au château faisait mijoter la soupe. Mais tout à coup, il vit de la suie tomber dans la marmite et déjà, il commençait à maugréer que voici trois pierres qui viennent épaissir son potage.

Sans doute une chouette que la fumée a réveillée, pensa-t-il en ajoutant, « attends que je t’attrape ». « Attrape moi si tu le peux » lui répondit un drôle de petit bonhomme qui venait de descendre de la cheminée. Jean des Arbres ne fut pas long à comprendre qu’il avait affaire à un korrigan. Une rude échauffourée suivit qui se termina, bien entendu, au bénéfice du korrigan, qui poussa et coinça notre Jean des Arbres entre une huche et le mur.

Déjà midi était passé depuis longtemps. Ses compagnons n’entendant pas la cloche sonner, décidèrent de rentrer au château. A leur arrivée, ils furent tout surpris de trouver Jean des Arbres dans une telle posture. « Que s’est il donc passé en cette demeure, pour que tout soit sans dessus-dessous ? » demanda Jean des Meules.

Ce château est hanté, il est la propriété d’un korrigan, c’est lui qui m’a mis en cette fâcheuse posture », dit en gémissant le sanguinolent Jean des Arbres. « Qu’à cela ne tienne, demain je te vengerai » répondit Jean des Meules.

Le lendemain, Jean des Arbres et Jean des Fers s’en allèrent à la chasse pendant que Jean des Meules jouait les chefs cuisiniers. Afin de mieux accueillir le korrigan, il avait déposé ses meules à proximité de la cheminée. La pendule du château indiquait presque les midi, la soupe de légumes bouillonnait, et Jean des Meules commençait à mettre en doute les déclarations de Jean des Arbres quant à l’existence du korrigan, lorsque quelques pierres vinrent épaissir le potage qui fumait dans la marmite à laquelle aurait certainement fait honneur Gargantua.

Te voici enfin, aurais-tu peur de mes meules pour n’arriver qu’à présent ? » cria Jean des Meules dans le conduit de la cheminée. « Peur de tes meules ! Pauvre idiot, tu veux me connaitre, et bien me voici. Permets-moi de te dire tout de même que le pays d’où tu viens doit être un pays bien pauvre pour avoir des meules de moulin de si petite taille, en mon pays, il leur faudrait plus d’un siècle pour moudre la récolte d’une journée.

Aussitôt, un rude combat s’engagea entre Jean des Meules qui devait regretter son beau pays de Tréhorenteuc et le korrigan qui coinça notre Jean entre ses meules avant de le jeter au fond d’un puits asséché.

Lorsque Jean des Arbres et Jean des Fers arrivèrent, la maison était vide et la soupe était servie, mais sur la terre battue. Ils cherchèrent en vain leur compagnon dans tous les recoins du château. Ce n’est qu’en traversant la cour qu’ils perçurent les cris désespérés venant du fonds du puits où se trouvait Jean des Meules.

Aussitôt, Jean des Fers lui tendit la barre de fer dont Jean des Meules se servit comme d’un corde pour remonter à la surface. « Le korrigan est un malin esprit, il vaut mieux quitter ce château qui est sa demeure » dit Jean des Meules en ayant bien du mal à se remettre de son aventure. « Quitter cette demeure sans que moi-même je n’ai testé ma force à ce lutin, il n’en est point question » dit Jean des Fers de Brignac. « Demain, c’est moi qui resterai aux cuisines le temps que vous alliez à la chasse.

Le lendemain, Jean des Arbres de Saint-Léry et Jean des Meules de Tréhorenteuc s’en furent à la chasse pendant que Jean des Fers de Brignac s’affairait aux cuisines. La soupe mijotait déjà depuis un certain temps lorsque des pierres venues d’on ne sait où vinrent épaissir le bouillon.

Alors que la grande barbe du korrigan apparaissait, Jean des Fers s’était saisi de sa barre et commençait à en faire goûter la rudesse à notre lutin qui criait pitié. Le combat fut de courte durée et cette fois, le korrigan en fut le perdant. Jean des Fers, avec l’aide de sa barre, le saisit et l’envoya choir dans une auge en granit.

Lorsque ses deux compagnons rentrèrent, la soupe trônait sur la table. « Comment, tu es venu à bout de ce korrigan » s’exclamèrent Jean des Arbres et Jean des Meules. « Bah, il n’était pas si fort que vous le prétendiez. Venez plutôt avec moi le contempler. Je l’ai envoyé dans l’auge de granit au fonds de la cour. » Quelle ne fut pas leur surprise en arrivant au lieu indiqué. Dans l’auge, il ne restait plus que la barbe ensanglantée du korrigan.

Jean des Fers, pestant après tous les diables, s’empara violemment de la barbe du korrigan en la déchirant. Aussitôt, un grondement se fit entendre, en se retournant, nos compagnons virent alors le château tombé en ruines, la terre s’ouvrit brusquement sous leurs pieds, et ils disparurent dans les entrailles de la terre.

Depuis ce jour, nul n’a entendu parler de Jean des Fers, ni de Jean des Arbres, pas plus que de Jean des Meules et encore moins du château hanté par le korrigan.



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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 18:11

Géant de la forêt de Brocéliande


I
Autrefois, il y a bien longtemps, un jeune homme de Plélan, dans le pays Gallo, dissipa, en quelques années une fortune péniblement gagnée par des parents laborieux. Une fois ruiné et abandonné de tous ceux qui l’avaient aidé à manger son bien, il n’eut pas assez de courage pour se mettre au travail, et, ennuyé, résolut d’en finir avec la vie.

Afin d’exécuter son dessein, il s’en alla dans la mystérieuse forêt de Brocéliande où, jadis, l’enchanteur Merlin et la fée Viviane se donnaient rendez-vous. Là, errant tristement près de la fontaine de Baranton, sous les vieux chênes, il se vit arrêté soudain par un Géant, qui se campa fièrement devant lui en disant :

— Jeune homme, je sais ce que tu viens faire ici ; je connais aussi bien que toi, l’état de ta bourse, aussi je vais t’offrir le moyen de te tirer d’embarras. Écoute-moi bien : si tu consens à revenir ici, dans un an, te mettre à ma disposition, tu pourras jusque-là continuer ta vie de plaisir.
— J’accepte, répondit l’étourdi. Donnez-moi de l’or et dans un an je serai votre esclave.
— Cherche dans ta poche, reprit le Géant, tu as des louis, et il y en aura toujours. Va, amuse-toi, mais reviens ici à l’époque convenue.

II
Jean Le Gouic - c’était son nom – recommença à semer l’or à pleines mains. Mais les plaisirs qui le charmaient autrefois finirent par le fatiguer et l’ennuyer. Les idées sérieuses s’emparèrent de son esprit. Il délaissa ses compagnons de débauche et rentra dans la voie du devoir. Les bons principes que sa mère lui avait inculqués dans son enfance, germèrent enfin dans son cœur.

L’or, qui provenait d’une source douteuse fut désormais employé à secourir les malheureux, et croyant que le géant en voulait à ses jours, il résolut de vivre en honnête homme et de mourir en chrétien. Le temps s’écoula vite, et le jour fatal arriva. Brave comme un Breton qu’il était, il n’appréhenda point la mort, et se rendit sans crainte au rendez-vous.

III
De retour dans les sentiers de la grande forêt, Jean aperçut un homme qui venait vers lui, courant à toutes jambes, et emportant dans ses bras une robe rose qu’il cherchait à cacher sous sa blouse. Aux allures de cet homme, Le Gouic reconnut un voleur. Il se précipita sur lui, le saisit au collet, et lui arracha le vêtement des mains, en lui demandant où il l’avait pris.

Le fripon, surpris au moment où il y pensait le moins, perdit contenance, se jeta aux pieds du jeune homme et lui demanda grâce en lui racontant qu’il avait dérobé cette robe à des jeunes filles qui étaient à se baigner dans un étang voisin. Jean, d’un air de mépris repoussa du pied le voleur, s’empara du vêtement et s’empressa d’aller le rapporter aux baigneuses de l’étang.

Il les découvrit, cachées sous les oseraies. Elles étaient trois, jolies à ravir et couronnées de fleurs. Deux d’entre elles parées, l’une d’une robe blanche comme la neige, l’autre d’une robe bleu d’azur, étaient occupées à remplacer le vêtement absent de leur sœur, par des feuilles de roseaux et des guirlandes de myosotis. Elles jetèrent de légers cris en apercevant l’étranger ; mais rassurées en le voyant s’avancer timidement vers elles, tenant son chapeau d’une main et de l’autre la robe dérobée qu’il leur offrit en expliquant comment elle était en sa possession. Après avoir remercié le jeune homme du service qu’il venait de leur rendre, elles lui exprimèrent leur crainte de le voir en ces lieux.

— Vous ignorez, sans doute, lui dirent-elles que vous êtes sur les domaines du géant de la forêt de Brocéliande, et que s’il vous voit, c’en est fait de votre liberté.
— Hélas ! Je ne le sais que trop. répondit-il, je lui appartiens corps et âme, et c’est ici qu’il m’a donné rendez-vous.

Il leur dit en deux mots son histoire, et les engagements qu’il avait contractés. Elles le plaignirent sincèrement, et lui promirent de faire tout ce qui dépendrait d’elles pour lui être utile.

— Nous aussi, ajoutèrent-elles, nous sommes ses esclaves ; mais filles d’un magicien - moins puissant que le géant - nous possédons cependant des talismans qui pourront peut-être servir dans les épreuves que vous fera subir le maître des lieux. Elles lui promirent de revenir le lendemain, au même endroit, et s’éloignèrent dans la crainte d’être surprises par le géant. Celui-ci arriva bientôt et félicita Jean de son exactitude.

— Je vois bien, dit-il, que je n’ai pas affaire à un ingrat, aussi je veux bien faire quelque chose pour toi. Je te récompenserai selon tes désirs, si dans trois mois tu m’as construit sur les landes incultes que tu aperçois du côté de Concoret, une ferme avec des étables pouvant contenir un troupeau de trois cents têtes, et si tu as transformé le sol en prairies, étang et terres labourées.

— Ce que vous exigez est impossible, lui répondit tristement Le Gouic. La vie entière d’un homme ne suffirait pas pour créer ce que vous demandez.
— Rien n’est impossible à l’homme courageux et bien doué. D’ailleurs c’est ton affaire ; réfléchis et mets toi à l’œuvre ou sinon tu iras pour le reste de tes jours, augmenter le nombre de mes serviteurs.

IV
Le géant s’en alla, laissant le pauvre garçon tout penaud de ce qu’il venait d’entendre. Jean passa la journée à gémir sur son sort et le lendemain, la jeune fille à la robe rose le trouva au même endroit, plus accablé que la veille.

Elle releva son courage, l’assurant que ce qu’on lui demandait n’était pas impossible. En effet, trois mois n’étaient pas écoulés, qu’à la place du sol ingrat qui ne produisait que des bruyères et des ajoncs, s’élevait une ferme magnifique avec jardin, prairies, étang et terres en plein rapport. Rien ne manquait. Ce prodige était dû, il est vrai, au pouvoir de la jeune fille. Le géant, prévenu de la transformation de son domaine, vint féliciter Jean et lui dit :

— Je suis content de toi ; mais cela ne suffit pas. Il faut encore que tu abattes, dans l’espace de quinze jours la moitié de la forêt qui est devant toi.
— Vos exigences n’ont pas de bornes, répondit le jeune homme indigné. Je le vois bien, vous en voulez à ma vie. Prenez-la plutôt à l’instant et que ce soit fini.

Le magicien ne répliqua pas et s’éloigna. Grâce encore au concours de l’enfant à la robe rose, la forêt fut abattue dans le délai fixé. Le géant, ravi et étonné en même temps, supposa que Le Gouic possédait un talisman, et voulut se l’attacher.

— Tiens, lui dit-il, je veux être généreux envers toi, je te rends ta liberté. Cependant, si tu voulais encore essayer de ravir à un magicien de mes ennemis, un oiseau d’une rare beauté, qu’il tient enfermé dans une tour, et que je convoite depuis des années sans pouvoir réussir à m’en emparer, je te donnerais pour femme la plus jolie créature du monde.

Jean songea aussitôt à sa protectrice et répondit :
— Maitre, je veux bien essayer ; je ne réponds pas de réussir, mais je promets de faire tout ce qui dépendra de moi.
— Va, lui dit le géant, si tu parviens à satisfaire mon désir, je n’aurai rien à te refuser.

V
Jean Le Gouic, effrayé de son audace, attendit avec impatience le moment où il pourrait revoir celle qu’il aimait plus qu’il n’osait se l’avouer lui-même. Il s’en alla l’attendre sur les bords de l’étang où elle le rejoignit bientôt. En apprenant ce dont il s’agissait, elle rougit, devinant le motif qui avait guidé le jeune homme ; mais promptement remise de son émotion, elle lui dit :

— La tâche que tu as acceptée est vraiment téméraire. Il y va de notre vie à tous les deux. Je crains bien que nous ne réussissions pas ; mais puisque tu as promis d’essayer, mettons-nous à l’ouvrage. Ils se dirigèrent vers la tour renfermant l’oiseau tant désiré. Malheureusement ils avaient été devancés par le géant qui passait sa vie à rôder autour de la demeure de son ennemi. En l’apercevant, la jeune fille s’écria :

— Nous sommes perdus, si le magicien nous voit ensemble. Il m’exilera dans un pays où tu ne pourras me retrouver, aussi n’hésite pas, coupe-moi bien vite par morceaux et enfouis-moi sous le gazon de la forêt. Seulement n’oublie aucune partie de mon corps, car autrement quand je reviendrai à la vie, il me manquera la partie de moi-même que tu auras négligé d’enterrer.

Bien qu’il lui en coûtât de déchirer le corps de la charmante enfant, il fit ce qu’elle lui demandait, et cacha, au pied d’un arbre, sous les feuilles et la mousse, les membres chéris de sa bien-aimée. Le géant, qui l’aperçut, vint le remercier de l’empressement qu’il mettait à accomplir son dessein.

— Je réfléchis, répondit Jean aux moyens à employer pour m’emparer de l’oiseau ; mais pour cela j’ai besoin d’être seul afin de me recueillir. Le magicien lui renouvela ses promesses et prit congé de lui.

VI
Le malheureux jeune homme était fort inquiet. Aussi, dès que le géant eut disparu, s’empressa-t-il de déterrer le corps de son amie. Il rapprocha les uns des autres les membres déchirés, les oignit d’un onguent que la jeune fille lui avait remis à cet effet, et sa joie fut extrême lorsqu’il la vit renaître et s’animer.

O ciel ! dans sa précipitation, il avait oublié d’enfouir l’un des doigts de la main gauche, et déjà sans doute, un animal carnassier l’avait emporté, car il fut impossible de le retrouver. Les deux amoureux étaient désolés. Malgré tout son pouvoir l’infortunée magicienne ne pouvait remplacer le doigt perdu. Elle oublia néanmoins son chagrin pour consoler Jean, et afin de le distraire elle lui parla des moyens à employer pour ravir l’oiseau.

— Écoute bien, lui dit-elle. Je vais te changer en milan. Ainsi métamorphosé, tu t’en iras tournoyer au-dessus du donjon, assez loin pour éviter les flèches des gardiens, et cependant assez près pour attirer leur attention. Moi, ajouta-t-elle, je vais prendre la forme d’une souris pour me glisser dans la tour. Une fois là, je deviendrai un aigle, et de mes serres puissantes je saisirai la cage d’or qui renferme l’oiseau, que j’enlèverai dans les airs, si les gardiens m’en donnent le temps. Maintenant à l’œuvre et du courage !

Si je réussis, j’irai m’abattre au bord de l’étang, témoin de notre première rencontre. Si au contraire j’échoue et je succombe, pense quelquefois à moi et sauve-toi au plus vite car le géant exaspéré te ferait un mauvais parti. Voyant que Jean s’attendrissait à l’idée de ne plus la revoir, elle ajouta : — Le moment est venu d’agir, du courage et en avant !

De sa baguette magique, elle le toucha et aussitôt un terrible milan s’éleva dans les airs et s’en alla planer au-dessus du château. Les gardiens lui lancèrent des flèches qui ne l’atteignirent pas.

VII
Pendant que le milan faisait ses évolutions, une toute petite souris montait prestement les degrés de la tour, et se glissait dans la pièce où se trouvait l’oiseau dans sa cage d’or. Tous les gardiens étaient sur la plate-forme, essayant d’atteindre le milan. Prompte comme l’éclair, la souris se changea en aigle, enleva la cage et l’oiseau, en passant par-dessus la tête des hommes qui tellement surpris, ne songèrent même pas à tirer sur le ravisseur.

L’aigle alla s’abattre au bord de l’étang. Le milan l’y suivit. Tous les deux reprirent leur forme première et, vraiment heureux de leur succès, s’embrassèrent avec effusion.

— Il n’y a pas un instant à perdre, dit la jeune fille, nous pourrions être poursuivis ; porte cet oiseau au géant, et profite de sa joie pour obtenir ce que tu désires, car bientôt il n’y consentirait plus. Jean s’empressa d’obéir.

Le magicien, en apercevant l’objet de ses rêves, devint fou de bonheur. Il embrassait Jean et prodiguait à l’oiseau les noms les plus tendres. Il dansa autour de la cage comme un insensé. Le Gouic lui rappela sa promesse.

— Oui, répondit le géant, je consens à te donner pour femme l’une de mes trois jolies esclaves. Je vais les faire venir, recouvertes d’un voile qui leur cachera la figure, le hasard décidera de ton sort.

Le jeune homme allait protester contre cette manière de faire, lorsqu’il aperçut sa bonne amie derrière la porte qui, un doigt sur la bouche, lui faisait signe de se taire en lui montrant sa pauvre main mutilée.

— C’est vrai, pensa t-il, je la reconnaitrai toujours, et il accepta l’offre du maitre.

Les trois jeunes filles furent introduites, recouvertes d’un voile qui les dérobait à tous les regards. Une main seule paraissait. L’amoureux n’hésita pas et se précipita aux pieds de la jeune fille en disant au géant : « Voici celle que mon cœur a choisie !

Le magicien avait une préférence marquée pour cette esclave et sembla contrarié. Il ne sut même pas cacher son mécontentement et répondit d’un air de mauvaise humeur : Jeune homme, tu as la main heureuse ! Cependant les fiançailles eurent lieu le jour même, et la noce fut fixée à bref délai.

VIII
Après la fête, les deux jeunes gens se rendirent au jardin pour causer de leur bonheur. La jeune fille fit remarquer à son fiancé la contrariété du maitre.

— C’est vrai, répondit Jean tout à sa joie, mais maintenant il n’y pense plus.
— Tu ne le connais pas encore, reprit la magicienne. Heureux aujourd’hui d’avoir obtenu un oiseau qui n’a pas son pareil au monde, demain il aura oublié ce qu’il te doit et suscitera des empêchements pour retarder notre union.
— Alors que faire ? Partons ! Fuyons cet être fantasque et méchant.
— C’est le seul parti raisonnable. Allons chez mon père qui est roi d’un pays lointain. Ce pauvre vieillard est dans les larmes depuis le jour où ma sœur et moi avons été enlevées à sa tendresse, par le géant jaloux du bonheur des autres.

— Fuyons au plus vite, répétait Jean.
— Oui, mais pour cela, reprit la jeune fille, il faut profiter des ténèbres, et exécuter fidèlement ce que je vais te dire.
— J’écoute, répondit l’impatient amoureux.
— Lorsque la nuit sera venue, tu te glisseras dans l’écurie du géant, et là tu prendras et selleras le cheval le plus laid, le plus maigre, le plus misérable que tu rencontreras.
— Pourquoi cela ?
— Je n’ai pas le temps de te répondre. Cours, pendant que je vais, de mon côté, tout préparer pour notre départ.

Le soir même, Jean se rendit à l’écurie du géant, et remarqua dans un coin, une pauvre vieille haridelle qui n’avait que les os et la peau, et paraissait incapable de faire un pas, tant elle était éreintée. Au lieu de suivre les conseils de sa fiancée, Jean crut qu’il valait mieux, pour eux, prendre le cheval fort et vigoureux qui se trouvait placé à côté du premier ; cet animal semblait, en effet devoir dévorer l’espace.

Son choix fait, il rejoignit la jeune fille qui, selon son habitude, lui avait donné rendez-vous au bord de l’étang. Celle-ci jeta les hauts cris en voyant la bête, et reprocha à son ami, de n’avoir pas eu confiance dans ses paroles.

— Le cheval que tu as pris, lui dit-elle, serait bon dans une autre occasion ; mais il ne pourra jamais lutter de vitesse avec celui dont tu as fait fi, et qui, talonné par le géant, fera ses vingt lieues à l’heure. Néanmoins, ajouta-t-elle, contentons-nous de ce que nous avons, et sauvons-nous au plus vite !

IX
Jean s’élança sur le coursier. La jeune fille prit place en croupe derrière lui et ils partirent au galop. Ils voyagèrent ainsi toute la nuit. Le matin, lorsque le soleil commença à briller, le cheval déjà fatigué ralentit le pas, et la peur d’être poursuivis s’empara des cavaliers qui osaient à peine se communiquer les tristes pressentiments qui les obsédaient.

Leurs craintes ne se réalisèrent que trop tôt, et un nuage de poussière qu’ils aperçurent derrière eux vint confirmer leur appréhension. Pour comble de malheur, une rivière leur barra le chemin, et à la suite de pluies torrentielles le passage à gué, qui existait en cet endroit, n’était plus praticable.

La jeune fugitive recouvra son sang-froid ; elle eut recours à la baguette magique qui lui avait été donnée par une fée sa marraine. Elle en toucha son compagnon, et tous les deux, abandonnant le cheval à lui-même, furent immédiatement changés en ablettes qui se précipitèrent dans la rivière. Le géant avait tout vu.

Une fois sur le bord de la rivière, il prit la forme d’un brochet, et continua sa poursuite au fond de l’eau. Malgré leur agilité, les petits poissons auraient sans doute été dévorés par le monstre, s’ils ne s’étaient rapprochés de la rive et métamorphosés en rats des champs, qui se sauvèrent à travers les foins. Le brochet, à son tour se changea en belette, et la chasse recommença de plus belle. Les malheureux rats sentaient leur poil se soulever sous le souffle de l’animal qui les poursuivait, lorsqu’ils prirent, soudain, la forme de deux alouettes qui montèrent dans l’air comme une fusée. La belette devint faucon et s’élança dans les nuages.

Les petits oiseaux se laissèrent tomber comme une balle au milieu d’un buisson touffu qui les déroba à l’œil de l’oiseau de proie. Une fois sur le sol, ils se changèrent en vers de terre, se blottirent sous une motte de gazon, et purent ainsi échapper à leur ennemi. Celui-ci chercha vainement sans pouvoir deviner ce qu’ils étaient devenus ? Il avala même des cailloux, supposant que ce devait être eux, puis enfin de guerre lasse s’en alla, croyant les avoir mangés.

X

Lorsque Jean Le Gouic et sa fiancé, eurent la certitude d’avoir échappé aux poursuites du géant, ils reprirent la forme humaine et continuèrent leur voyage. Ils arrivèrent dans la ville où Jean était né, et où il avait une sœur qu’il aimait tendrement. Il manifesta le désir de la voir, et pria la princesse de l’accompagner.

— Non répondit-elle, je ne veux être présentée à ta famille que lorsque je serai devenue ta femme.
Jean insista mais sans succès.
— Conduis-moi dans une hôtellerie où tu viendras me reprendre, lui dit la jeune fille. Seulement n’oublie pas encore les recommandations que je vais te faire, il y va de notre bonheur. Tu ne peux être embrassé par aucune femme, pas même par ta sœur, sous peine de perdre la mémoire. Tu oublierais tout ce qui s’est passé, et tu ne songerais même plus que je t’attends pour me conduire chez mon père.

Jean, bien que surpris, jura de ne se laisser embrasser par aucune femme, et se rendit chez sa sœur. Cette dernière, en revoyant l’enfant prodigue qu’elle croyait perdu, voulut s’élancer à son cou ; mais il sut éviter ses caresses en se précipitant sur ses neveux qu’il dévora de baisers. La jeune femme fut contrariée de voir que son frère cherchait à la fuir. Elle n’en fit rien paraître cependant et la journée se passa en festins pour célébrer le retour du voyageur.

Le soir venu, il se retira dans la chambre qu’il habitait autrefois et où rien n’avait été changé parce qu’on espérait toujours son retour. Exténué de fatigue il se coucha et s’endormit presque aussitôt. Sa sœur voulant avoir une explication, au sujet de la froideur de Jean, se rendit dans sa chambre mais le trouva endormi. Elle ne voulut pas le réveiller. S’approchant doucement de son lit, elle l’embrassa sur le front, comme elle faisait lorsqu’il était enfant.

XI
Le lendemain, Jean se réveilla tard. Il lui sembla avoir fait un singulier rêve. Il se rappelait confusément un voyage dans une forêt, la rencontre d’un géant et de magiciennes roses, blanches et bleues ; mais tout cela était tellement vague dans son esprit qu’il n’y fit pas grande attention.

Sa sœur désira le garder près d’elle, et comme il était intelligent et instruit, son beau-frère lui procura un emploi suffisamment lucratif et qu’il remplit consciencieusement. Des mois et des années s’écoulèrent ainsi.

Un jour que Jean était allé à la chasse, par une chaleur excessive, il fut pris d’une soif inextinguible qui l’obligea à chercher une ferme pour se rafraichir. Dans la métairie où il entra ce fut une servante fort jolie qui lui servit à boire. Il regarda attentivement la figure de cette jeune fille, lorsque, soudain, la main mutilée qu’il aperçut lui rappela tout son passé. Il se mit à pleurer comme un enfant, et se jeta aux genoux de sa fiancée pour lui demander pardon.

— Relève-toi. Jean, lui dit-elle. Tu n’as pas manqué volontairement ta promesse, la fatalité seule est cause de notre malheur. Elle lui raconta alors ce que lui-même ignorait, c’est-à-dire le baiser de sa sœur, et par suite l’oubli complet de tout ce qui lui était arrivé.

— Et toi, lui dit-il, qu’es-tu devenue depuis notre séparation ?
— Je suis restée aussi longtemps que mes ressources me l’ont permis dans l’hôtellerie où tu m’avais conduite. Puis, n’ayant plus d’argent, il me fallut chercher une occupation pour pouvoir vivre. J’aurais peut-être pu m’en aller en mendiant, jusqu’aux états du roi mon père, mais je n’ai pas eu le courage de quitter le pays que tu habitais. Je vins ici, sous ces habits de paysanne, demander à entrer comme servante ; on m’accepta et j’y suis restée.

XII
Sans plus tarder, Jean Le Gouic, voulut partir pour le pays du père de sa bien aimée. Ils achetèrent un cheval pour continuer leur voyage comme ils l’avaient commencé, et, cette fois, le trajet se fit sans encombre. L’infortuné roi, en revoyant sa fille, versa des larmes de joie.

Lorsqu’il eut connaissance des projets formés par les deux jeunes gens il en fut ravi, espérant bien trouver dans son gendre un fils dévoué et soumis. Le mariage eut lieu ; et aussitôt après, sur les conseils de sa femme, Jean enrégimenta des soldats, les forma à tous les exercices de la vie militaire, et ne tarda pas à avoir une armée assez forte pour lui permettre d’aller combattre, avec des chances de succès, le géant de la forêt de Brocéliande, afin de délivrer les deux autres princesses.

La nouvelle épouse voulut accompagner son mari pour l’aider de son pouvoir. Le roi, fier de leur audace, les encouragea, et le moment de séparation arrivé, leur donna sa bénédiction. L’entreprise réussit. Le Gouic et le géant combattirent corps à corps. Le jeune breton prouva, par son courage et son sang-froid, qu’il était de noble race. Il parvint après une lutte qui dura plus d’une heure, à terrasser son ennemi.

Les jeunes filles furent ainsi délivrées et ramenées à leur père. Par reconnaissance, le roi se démit de sa couronne en faveur de son gendre, qui n’accepta que sur les instances de toute la famille. Son règne fut des plus heureux, et l’union la plus parfaite ne cessa d’exister à la cour du jeune roi breton.



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Le Lac du miroir aux fées Empty Re: Le Lac du miroir aux fées

Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 18:13

La fée de Brocéliande


I
On connaît de renom l’antique et mystérieuse forêt de Brocéliande, aujourd’hui de Paimpont, si célèbre dans le roman de la Table Ronde. C’est là, nous dit M. Emile Souvestre, que se trouvaient le Val des faux amants, où restait prisonnier tout chevalier traître à sa dame ; la fontaine bouillante de Baranton, dont la margelle était une émeraude, et le bassin d’or, avec lequel se puisait l’eau qui amenait la tempête. Merlin y avait longtemps caché sa tendresse pour la fée Viviane et s’y trouvait encore, selon la tradition, « endormi d’un sommeil magique au pied d’un buisson d’aubépine. » C’est dans ce lieu, célèbre par les légendes, que nous allons errer quelques moments, au bruit du vent dans les vieux chênes, aux soupirs éteints, mais saisissables encore parfois, de la harpe de Viviane.

Sur le bord de la forêt s’élevait jadis l’antique castel du seigneur Méliaw, sire de Paimpont (ou autres lieux, la tradition se trouvant peu précise à cet égard). Le vieux seigneur, au temps du roi Morvan , que la gloire nationale a nommé Lez-Bréïz ( soutien de la Bretagne), habitait ce château avec sa fille unique, Marguerite, et un petit nombre de varlets et gens de service. Désormais trop vieux pour marcher au combat, le sire Méliaw vivait paisible et retiré dans son domaine. Plein de confiance dans sa fille qu’il adorait comme une créature angélique, il lui accordait la plus entière liberté. Marguerite était aussi bonne et pieuse que belle, mais par malheur son esprit, facilement impressionnable, avait .subi l’influence de la lecture des romans de chevalerie, ou, pour parler plus exactement, les longs récits, appris durant les veillées d’hiver, les traditions et histoires merveilleuses du temps passé, avaient exalté son imagination. Marguerite, comme une nouvelle Viviane , se plaisait à errer, le soir, dans les sentiers de la forêt ; parfois même, sans crainte comme sans reproche, la jeune fille, tout ignorante des choses du monde, osait prolonger sa promenade solitaire jusqu’aux bords de la fontaine de Baranton ; et là, s’oubliant dans ces lieux remplis de mystère , assise sur un rocher qui dominait la fontaine , elle chantait, avec le doux accompagnement des voix de la nuit et des murmures des bois, les lais touchants dont on avait bercé son enfance.

Un soir, elle chantait ainsi, auprès de la source sacrée : la brise molle du printemps faisait vibrer dans les arbres comme les cordes des harpes éoliennes. Marguerite disait :

Voici l’heure où la fée arrive,
L’heure si chère au cour aimant,
L’heure où Viviane plaintive,
Comme une colombe craintive,
Sort de sa grotte en soupirant.
Écoutez ses soupirs, ses larmes ;
Elle dit : – Bergers de ces lieux ,
Fuyez , hélas ! fuyez les charmes ,
De Merlin redoutez les armes,
Craignez les coups mystérieux.

Alors Marguerite prêta l’oreille aux bruits des échos et du feuillage ; elle ajouta :

À mes tristes accents l’écho toujours fidèle
Répond seul à ma voix.
Voici venir la nuit , j’entends glisser son aile,
En passant sous les bois.
Je crois entendre encore un bruit dans le feuillage,
Comme un spectre qui fuit.
Merlin, serait-ce vous ? Mais non... dans le bocage
C’est le vent qui gémit.

La jeune fille se tut. Soudain une voix répondit à sa voix par des accents délicieux..... Était-ce un voyageur égaré dans la forêt ou attiré par les chants de Marguerite ? Était-ce un chevalier enchanté, condamné à errer dans ces lieux pour avoir trahi sa dame ou ses serments ? Point ne le pouvait deviner la gente châtelaine de Paimpont. Elle entrevit cependant, à la clarté des étoiles, l’ombre d’un guerrier immobile ; elle vit briller sa cuirasse sous les plis de son manteau, puis elle s’éloigna silencieusement.

Trois jours de suite, Marguerite revint à la fontaine. Chaque fois le chevalier timide et inconnu s’y trouvait, à la même place. La troisième fois pourtant, si la tradition est fidèle, le jeune homme (qui n’était nullement enchanté), osa parler à la fille du seigneur de Paimpont. Marguerite, qui ne connaissait point la dissimulation, et ne voyait rien qu’à travers la pureté de son âme, répondit au chevalier avec cette voix simple, naïve et pleine d’un charme étrange qui n’appartient que rarement aux filles de la terre :

— Sire chevalier, lui dit-elle, que cherchez-vous au fond des bocages enchantés de Brocéliande ? Est-ce la blonde Viviane, dont les charmes vous attirent ? ou bien venez-vous ici pour arracher à Merlin ses secrets dangereux ?

— Non, non, jeune fille, fée ou enchanteresse, qui que vous soyez, répondit-il, j’ignore quel destin m’entraîne ; mais depuis longtemps, c’est vous, vous que je vois dans mes rêves. L’autre soir , je me rendais au camp de Morvan, le roi des Bretons, dont je suis l’écuyer, lorsque, dans mon ignorance des sentiers de cette forêt, je me suis égaré sous ses ombrages où le bonheur m’a conduit.

— Son admiration naïve m’enchante, et ses paroles ne sont point sans charme. Il me prend sans doute pour une fée ; laissons-lui son erreur, se dit Marguerite ; puis elle continua : — Seigneur chevalier, je ne puis m’attarder davantage. L’ombre nous environne de toutes parts et obscurcit déjà tous les sentiers ; partez, partez sans délai, car quelque génie de la nuit pourrait vous entraîner dans le Val des faux amants, où reste prisonnier tout chevalier infidèle à sa dame.

— Par pitié ! ne me croyez pas infidèle , s’écria l’écuyer ; je ne trahis jamais ni mon roi, ni l’honneur. Puis il ajouta dans le langage des preux :

À l’honneur j’ai voué ma vie,
A la gloire , tous mes amours ;
Pour le bonheur de ma patrie,
Oui, je veux combattre toujours.
Je veux, pour Lez-Breïz, que j’aime,
Vaincre ou tomber dans le combat.
Je veux encor, bonheur suprême !
Pour mon Dieu, mourir en soldat !

— Que de vaillance et d’amour de la gloire ! murmure Marguerite. Quel grand cœur ! je vais... Mais non, non, pauvre fille des bois, demeure inconnue. Ne l’oublie jamais, tout le bonheur est là... — Elle ajoute à haute voix : — Vaillant écuyer, vous qui aimez la gloire et l’honneur, puissiez-vous être vainqueur dans la prochaine guerre, c’est mon vœu bien ardent.

Et comme le chevalier la regardait avec autant d’étonnement que d’admiration, elle continue en lui tendant la main :

- Adieu, adieu , noble seigneur ; souvenez-vous de moi, de la fée de Brocéliande, que l’on nomme Marguerite... Marguerite de... — Le nom expire sur ses lèvres et elle s’enfuit précipitamment.

— Marguerite... une fée ! un ange ! qui est-elle ? s’écrie l’écuyer de Morvan. Partie ou envolée pour jamais peut-être.... Hélas ! sort cruel, qui m’avez conduit ici, me rendrez-vous jamais l’ange que j’ai perdu ?... Mais je délire. Je demande à retrouver une fée... Pauvre insensé ! cependant si c’était... Oh ! oui, c’est une créature angélique ; je le devine aux battements de mon cœur, et j’ai senti sa main trembler dans la mienne.

II
Énolé (c’était le nom du jeune écuyer) revenait triste et pensif dans le sombre sentier de la forêt. Un guerrier le suivait de près sans qu’il s’en fût aperçu jusque là. Ce dernier ayant pressé sa marche, Énolé s’arrêta au bruit des pas du nouvel arrivant.

— O mon seigneur, s’écria-t-il, pourquoi hantez-vous, à cette heure, les abords de ces lieux enchantés ? Ne craignez-vous pas quelque charme de Merlin, trop souvent ennemi de nos princes ?

— Ami, je ne crains rien pour moi-même, répondit le roi (car c’était Morvan) ; cependant j’ai voulu savoir pourquoi mon écuyer fidèle me quittait aussi souvent ? Pourquoi Énolé, que j’aime comme un frère, devenait triste et songeur sans en dire la cause à son chef, à son ami ? Pourquoi mon meilleur chevalier s’éloignait de mes conseils, et fuyait ma tente au moment de la guerre ? Pourquoi...

— Arrêtez, seigneur, ne blâmez pas celui qui veut mourir pour vous. Plaignez-moi plutôt, car j’ignore moi-même la vraie cause de mon mal.

— Je vais le rendre malheureux, se dit le prince, mais il le faut, pour quelque temps du moins. La Bretagne a besoin du bras d’Énolé et l’amour nous le ravirait. Il ajouta : — Ami, je veux dissiper l’illusion qui t’obsède. Caché dans ces buissons épais, j’ai entendu ton entretien avec cette fée cruelle, dont il faut chasser l’image de ton cour.

— Hélas ! seigneur, que dites-vous ?

— La vérité. Ne sais-tu pas que cette fontaine se trouve à l’entrée du val trompeur des Faux amants ?

— En effet, elle a parlé de ce val funeste. — Elle voulait sans doute t’y entraîner.

— Elle n’y songeait pas. La candeur s’unissait à la beauté dans sa personne angélique.

— Elle avait jeté un voile sur tes yeux.

— Ah ! c’est impossible ! s’écria le jeune homme ; par pitié, seigneur, n’achevez pas : Marguerite n’a rien fait pour me tromper.

—Tu la connais donc, insensé ? reprit le roi. Alors, qui est elle ? réponds...

— Hélas ! je l’ignore... je l’aime ! N’est-ce pas assez ?

— Pauvre ami, continua l’impitoyable Morvan, ton désespoir me désole ; il briserait tes forces et ton courage, si précieux à la veille d’une guerre à mort. Ravive ta haine pour les Saxons 2 ! Oublie, oublie une vision, que la brise du soir emporte sur ses ailes ; car celle que tu aimais, ô Énolé, ce n’est pas une enfant de la terre : c’est une fée, une fille des songes, c’est Viviane elle-même !... Oui, Viviane, la perfide amie des chevaliers saxons ! Ne l’as-lu pas reconnue à ses accents ?

— Accents si doux ! murmura l’écuyer.

— Et si trompeurs ! reprit le roi ; mais comment n’as-tu pas remarqué ses yeux qui fascinent, sa chevelure d’or, sa beauté surnaturelle ? Tremble, tremble, ami, car Merlin est là, derrière ce buisson enchanté ; il l’épie cruellement.

— Malheur ! malheur à moi ! s’écria Énolé éperdu. J’arrache son image de mon cœur. À présent, viennent les Saxons, je pourrai du moins mourir pour Lez-Breïz.

Et plus ne revint le chevalier auprès de la fontaine de Baranton, ou l’attendit vainement et souventes fois la triste Marguerite.

III
Nous avons dit que Morvan, se fondant sur l’appui d’Énolé, sa meilleure lance, avait conçu le dessein de le tromper en lui affirmant que la jeune fille de la fontaine n’était autre que Viviane, la fée qui hantait ces bocages écartés. Par ce moyen, le prince ramenait son écuyer à la vaillance, au devoir, à l’ardeur des batailles. Il voulait, en outre, éprouver sa fidélité, sa constance et comptait lui rendre son bonheur lorsque la guerre serait achevée. Mais, hélas ! cette guerre devait être terrible : l’empereur, Louis le Débonnaire, mécontent de voir la Bretagne repousser sans cesse le joug des Franks et entraîné par les perfides conseils de Lantbert, comte des marches, avait juré de la réduire par le ravage et l’extermination.

Peu de jours après, le moine Witchar vint de la part du César frank porier au Tiern (chef) des Bretons les dernières conditions de son puissant ennemi. Le moine termina ainsi son discours :

— Cesse, ô Morvan, de t’abuser, toi et les tiens ; viens implorer la paix de Louis. Si tu veux conclure avec les Franks une paix juste et durable, dont tes sujets n’ont que trop besoin, suis-moi sans tarder ; viens reconnaître l’indulgente loi du pieux César. Tu resteras le chef d’un puissant domaine ; tu auras des soldats nombreux ; tu donneras de belles batailles ; mais si tu persistes dans ta révolte, quand même les peuples alliés se joindraient à toi, comme autrefois à Turnus les Rutules, jamais tu ne triompheras des Franks, dont tu as usurpé le territoire...

Pendant ce discours, Morvan, — rapporte la chronique latine d’Ermoldus-Nigellus, — frappait du pied la terre. Il semblait irrésolu. Alors, il leva sur son écuyer fidèle un regard interrogateur. Énolé le comprit : des larmes de colère brillaient dans ses yeux, au souvenir de sa patrie outragée, et peut-être au souvenir de la cruelle erreur qui lui déchirait l’âme.

— Honte et malheur ! murmura-t-il à l’oreille du roi. La honte ou la guerre, choisissez !

— Guerre et mort aux Saxons, s’écria le Tiern en se levant sur le seuil. Et la tradition nous a conservé sa réponse : — Que les Saxons viennent, continua-t-il, j’ai pour voler au-devant d’eux mille charriots pleins de flèches toutes prêtes ; j’ai mes boucliers peints à choquer contre leur boucliers blancs. Je me battrai sans aucune crainte avec eux !

Tels furent les adieux de Witchar el de Morvan-Lez-Bréïz.

IV
Deux années s’écoulèrent. Une guerre terrible, comme elle avait été annoncée, désolait la Bretagne armoricaine, souvent écrasée , jamais soumise. À un Tiern, à un héros abattu succédait un héros plus indomptable.. On eût dit (et les Franks en paraissaient convaincus ) que les héros bretons renaissaient de leurs cendres. À Morvan-Lez-Bréïz, mort ou mystérieusement enseveli au fond de quelque retraite ignorée, avait succédé Wiomarh, le sauvage précurseur de Nominoë. On ignorait le sort d’Énolé. Le château de Paimpont était plus silencieux que jamais. La bannière noire flottait attachée sur le donjon depuis la mort de Morvan. Marguerite, plus que jamais solitaire et désolée, errait chaque jour dans les sentiers les plus sombres de la forêt, mais rarement sa voix, devenue plus plaintive, troublait le silence des ombrages.

Un soir qu’elle égarait sa muette douleur dans ces lieux tant aimés naguère, elle rencontra, à genoux sur une roche, non loin de la fontaine, un pauvre ermite qu’elle ne connaissait pas. Le solitaire semblait prier ou méditer pieusement, les yeux attachés sur le ciel. Enfin ses regards s’abaissèrent et vinrent s’arrêter sur Marguerite. Il se leva lentement.

— Fille du sire de Paimpont, lui dit-il, je n’ignore pas qui tu pleures dans ces bois. Ne te trouble pas aux paroles d’un vieillard, qui a trop connu le monde et qui veut le fuir à jamais, d’un vieillard, qui a pu causer des maux dans sa vie, mais qui emploiera à faire le bien le peu de jours que la main de son Créateur lui voudra dispenser encore.

Il se fit un silence prolongé dont s’augmentait encore le trouble de Marguerite. Le vieillard reprit : .

– Énolé, que tu regrettes, survit à son roi. Les blessures de son corps se ferment peu à peu ; celles de son cœur se fermeront-elles jamais ? Cependant, va en paix, ma fille, et espère en la bonté des cieux.

Marguerite s’éloigna, retenant ses larmes. Le moine Witchar (c’était lui) la suivit quelque temps des yeux jusqu’au détour du sentier.

— Ta douleur peut être consolée, jeune fille, s’écria-t-il ; mais la mienne, la mienne !... Pourrai-je laver ma trahison dans ce désert ? Lez Breiz n’est plus, et c’est moi, moi dont l’ambition a causé sa perte. Cendres de mon roi, me pardonnerez-vous ?... Mais que vois-je ? Un pèlerin fugitif peut-être !

L’ermite se leva à l’approche du voyageur, sans doute égaré dans la forêt.

— Qui es-tu, mon fils ? lui dit-il. Ma tête blanchie me donne le droit d’interroger et de consoler les malheureux. Qui es-tu ? D’où viens-tu ?

— Qui je suis ? répondit l’inconnu d’un air égaré, qui je suis, moi ? rien ; je ne suis plus que l’ombre d’un guerrier ; j’ai tout perdu, mon esprit, mon cœur et mon roi. Un traître, un perfide, a causé la ruine de Morvan, en livrant aux Saxons les passes de nos marécages. Malheur sur...

— Silence, mon fils ! Les malheureux ne doivent pas maudire leurs frères. Le pardon ! Jésus ne l’a-t-il pas enseigné ? Et puis, la pitié, la pitié n’est-elle pas réservée au coupable repentant ? Ainsi, pardonne, ô Énolé ; je t’ai reconnu, ne détourne pas les yeux.

— Énolé ! reprit le fugitif ; qui parle ici de l’écuyer de Morvan ? Ne répète plus ce nom, vieillard ; Énolé est mort auprès de Lez-Bréiz.

— Hélas ! il a perdu la raison, se dit le moine. Seigneur ! Seigneur ! inspirez-moi ; que je puisse du moins rendre à ce malheureux une partie de ce que ma faute lui a ravi.

À ce moment, les accents d’une voix éloignée viennent mourir aux oreilles du moine et d’Énolé. Ce fut comme un trait de lumière pour Witchar ; il saisit soudain le bras du jeune homme.

- Écoute, lui dit-il ; ne reconnais-tu pas cette voix ? Renais à la raison, à l’espoir, ô mon fils ! Marguerite est fidèle ; tu la retrouveras.

– Marguerite ! répond Énolé, en rassemblant avec effort ses souvenirs ; Marguerite, ma triste fiancée, ce n’est qu’au ciel que je puis la revoir ! ce n’est pas une fille de la terre. Puis il continue, au milieu d’un délire douloureux :

Je m’en souviens, douleur amère !
Celle que j’aime est dans le ciel ;
Elle reviendra sur la terre
Lorsque Morvan, mon roi, mon père,
Verra le jour de son réveil.

Hélas ! ce souvenir me glace :
Partout je vole et suis ses pas ;
Partout je retrouve sa trace ;
Ainsi qu’une ombre, elle s’efface...
Morvan ne se réveille pas.

Adieu, adieu, mon père.

Alors l’insensé se retourne pour prendre la main du vieillard ; il a disparu. Énolé se dispose à partir, lorsque le même chant, plus rapproché cette fois, le frappe de surprise et répand dans tout son être un trouble inexplicable ; puis il voit une blanche forme s’avancer vers la clairière assombrie.

— La voilà ! s’écrie-t-il éperdu ; c’est-elle, la jeune fée de la fontaine, qui a pris mon âme ; la fille du soir qu’un souffle va dissiper bientôt.

Adieu, fantôme ou rêve,
Si cruel et si doux ;
Beau songe qui s’achève,
Ou que la brise enlève !
Ah ! pour jamais, envolez-vous !
Adieu, touchant murmure,
Douces harpes des bois,
Soupirs de la nature,
Chers accents, voix si pure,
Adieu ! pour la dernière fois !

— Arrête, arrête, Énolé, lui dit le vieillard ; dissipe cette funeste illusion ; reviens à la lumière. Sur mon salut, celle que tu vis, il y a deux ans, au bord de la fontaine, c’est Marguerite qui te tend la main, la fille du sire de Paimpont ! Viens, viens, mon fils ; suis nous au château. C’est là que Witchar veut le rendre la joie et obtenir miséricorde.

— Witchar ! Witchar ! s’écria Énolé, s’égarant de plus en plus ; Witchar ! le traître qui perdit Morvan ! Et j’allais croire à sa parole maudite ; j’allais succomber aux artifices trompeurs de Viviane et de Merlin !... Non, non, laissez-moi ! O Lez-Bréīz ! ô mon roi ! je n’ai plus qu’à mourir, puisque je t’ai perdu pour jamais !

À ces mots, le malheureux insensé s’éloigna rapidement, sans qu’il fût possible de le retenir. Alors, prenant une course folle, il gravit les roches les plus escarpées, au-dessus d’un ravin creusé par les torrents de l’hiver, et s’y précipita d’un bond désespéré....

Et si l’on demande quel fut le sort de Marguerite, nous répondrons, comme la légende, que, morte sans doute de douleur après la triste fin de celui qu’elle aimait, la châtelaine de Paimpont est identifiée, dans le souvenir populaire, avec l’ombre de la fée Viviane qui habite toujours les abords de la fontaine de Baranton.




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Message par Amarante. Jeu 23 Juin - 18:15

Pierres maudites de Tréhorenteuk


On remarquait jadis au milieu des landes sauvages qui s’étendent entre Kon-Koret (le val des fées) et le bourg de Tréhorenteuk, sur la lisière des bois de Néant, une petite vallée toujours fraiche, et une colline toujours verte, dont le riant aspect contrastait singulièrement avec la sombre parure des plaines d’alentour ; et pourtant, ces lieux si riants au regard, à l’heure où le soleil réjouit la nature, ces lieux arrosés par de limpides ruisseaux, étaient même alors, avant la métamorphose que nous allons raconter, soigneusement évités par les gens du pays, surtout dès que le jour commençait à décliner... C’est que les Korets (ou korredd), les fées aux cheveux d’or, alternaient, dit-on, chaque nuit, avec les Korrigans de Tréhorenteuk, pour s’y ébattre follement au clair de la lune, et malheur au chrétien imprudent qui eût surpris leur ronde nocturne.

Depuis, cet endroit est plus redouté encore : la vengeance divine paraît s’être étendue sur ce vallon, et l’avoir marqué des signes d’une malédiction éternelle. Les rochers semblent noircis et brisés par la foudre ; les herbes fanées ne reverdissent jamais ; la bruyère desséchée ne porte plus de fleurs, et l’on dirait que la lande conserve les traces d’un incendie récent.

Autrefois, non loin de ce vallon funeste, s’élevait le château du sire Gastern de Tréhorenteuk. Sans femme, sans enfant, sans chapelain, sans amis, cet homme sans foi ni loi, vivait presque seul en ce noir donjon. Il n’était entouré que de quelques soudards et valets sans peur ni principes (autant qu’il en était besoin pour guider à la chasse les grandes meutes du seigneur Gastern). Il chassait par tous temps et saisons ne craignant pas plus le soleil que la glace, le tonnerre, la pluie ou l’ouragan. Ses courses n’avaient pas de limites pour ainsi dire, ses pas ne connaissaient point d’entraves, son ardeur méprisait tous les obstacles. Aussi, quoiqu’il se fût attiré plus d’une querelle avec les seigneurs plus ou moins éloignés de ses domaines, il avait fini par être tellement redouté à dix lieues à la ronde que nul désormais n’osait s’exposer aux effets de sa colère et de sa vengeance.

En disant que le sire Gastern n’était entouré que de mécréants en son château, nous oublions qu’il avait eu longtemps auprès de lui un jeune garçon orphelin, son neveu et filleul, nommé Jéhan, lequel, pieux, doux et patient, avait su conquérir sur l’esprit farouche du baron une influence salutaire. Aussi, pendant le séjour du jeune homme au château de Tréhorenteuk faut-il reconnaitre que, sans être ni exemplaire ni chrétienne, la conduite du seigneur avait été du moins à peu près exempte de scandales affligeants. Mais malgré ses efforts, ses larmes et ses prières, jamais l’infortuné Jéhan ne réussit à ramener son oncle impie à la foi des ses pères. Pour lui, méprisant les séductions contraires, souvent mises en œuvre pour l’ébranler dans sa vertu, et voyant que ses supplications étaient vaines et tournées en plaisanteries cruelles, il cru devoir dire un jour un éternel adieu au manoir de Tréhorenteuk et alla demander asile au monastère hospitalier de Saint-Méen. Grande fut la colère du seigneur à ce brusque départ ; on dit même qu’il versa en cette circonstance les premières et les seules larmes de ses yeux, car il aimait son neveu plus qu’il ne s’en doutait lui-même en son cœur violent et acerbe.

Mais hélas ! — et c’est pourquoi, en s’éloignant, Jéhan commit, sans le savoir, une faute irréparable — le vin aidant, la chasse et les batailles ensuite, Gastern effaça bientôt de sa mémoire obscurcie l’image touchante et pure de son doux neveu. Il se livra aux désordres les plus effrénés. Il augmenta le nombre de ses valets, soudoya de nouveaux soudards et routiers mal famés, et tourmenta plus que jamais son voisinage par ses brutalités et ses rapines. On eût dit, dès lors, que le diable régnait en maitre dans le donjon de Tréhorenteuk : plus de repos, plus de sommeil pour le cruel baron. Il faut, nouveau Juif-Errant, qu’il s’agite sans cesse, qu’il marche toujours... Il ne connaît d’autre délassement que la table et l’orgie, d’autre plaisir que la chasse à outrance et les combats sans merci. Ses valets eux-mêmes n’y peuvent tenir et demandent grâce devant ce possédé du démon, qui les fait trembler. Ces mécréants reçoivent déjà la punition de leurs crimes ; celle du maitre ne tardera pas à venir, car la coupe déborde, la patience du ciel enfin lassée, l’heure de la justice va sonner.

Depuis plusieurs années, on ne connaissait plus ni dimanche ni fêtes au château de Tréhorenteuk ; aucun moine, aucun prêtre, n’eût osé s’y aventurer tant était grande la réputation d’impiété du vieux sire. Jéhan priait et pleurait en silence, dans le monastère, sur l’aveuglement et les désordres du frère de la mère ; cependant, il ne pouvait se résoudre à pénétrer dans ce repaire de crime et de scandale ; non pas qu’il tremblât pour ses jours ou pour sa pieuse vertu, mais il craignait que son oncle ne voulût, s’il tombait en son pouvoir, le retenir par tous ses moyens, même par la force et la violence.

Un soir — c’était la veille de la Toussaint —, un moine du couvent, s’étant attardé au loin pour accomplir des œuvres de son charitable ministère, vint à passer dans le pays que Gastern fréquentait dans ses excursions ordinaires de chasse ou de maraudage. En ce moment, un orage paraissait sur le point d’éclater. Le pauvre homme, tout occupé de ses prières, tomba tout à coup au milieu d’une troupe de gens armés que commandait le terrible Gastern en personne.

— Par ma barbe, dit le sire, qu’une chasse heureuse mettait en belle humeur, c’est un moine, je crois, que nous tenons. Par saint Hubert qui m’a fait tuer trois chevreuils aujourd’hui et détrousser un brave que son bagage paraissait gêner, ce qui est, je pense, une œuvre méritoire en pareille occasion. Des éclats de rires prolongés interrompirent cette harangue du sire. — Silence, manants, fit-il, et laissez-moi continuer. Je disais donc, par saint Hubert, que ce moine paiera pour tous les autres ; et que si le prieur de Saint-Méen veut le ravoir, il viendra le réclamer en personne, avec cent écus d’or par dessus le marché. Qu’en dites-vous mes amis ? — Bravo seigneur Gastern.

— Venez, venez, vénérable moine, reprit le sire avec une feinte déférence. Vous trouverez au château de Tréhorenteuk tous les égards qui vous sont dus.
— Ah ! ah ! ah ! firent tous les misérables en éclatant de rire.
Et la troupe se mit en marche, suivie par le pauvre moine, dont quelques soudards pressaient les pas trop lents à leur gré. Bientôt, le sire Gastern s’arrêta au carrefour d’un chemin. — Par ma barbe ! dit-il, j’allais oublier chose importante. Holà ! maitre Vautour, mon gentil courrier, déploie incontinent tes ailes et vole vers Saint-Méen sans retard. Si le prieur est couché, tu le réveilleras poliment, et lui offrant les respects du sire Gastern, tu lui diras que n’ayant pas de chapelain à Tréhorenteuk, je veux y garder un moine pour chanter vêpres et matines.

Et comme le Vautour s’éloignait déjà en maugréant de cette corvée inattendue, le baron ajouta ces mots : — Tu diras de plus au prieur que si avant trois jours je n’ai pas reçu cent écus d’or pour la rançon de son moine, j’irai brûler son couvent, et que le moine sera pendu. Le Vautour partit comme une flèche et se rendit à Saint-Méen, malgré le vent et la pluie, qui tombaient à torrents. Il n’arriva au monastère qu’à une heure fort avancée de la soirée. Jéhan priait dans sa cellule ; le prieur veillait en attendant le retour du moine qu’il avait sans doute chargé de quelque message ; du reste, tous, en ce saint lieu, veillaient et priaient afin de se préparer dignement à célébrer la grande fête du lendemain, lorsque le vacarme que fit le Vautour à la porte du couvent vint troubler la paix de leurs méditations. Enfin, le mécréant exposa au prieur l’objet de sa mission, en ayant soin de renchérir encore sur les ordres de son maître. Le digne moine l’entendit sans pâlir :

— Que votre volonté soit faite, ô seigneur, murmura-t-il en voyant s’éloigner le misérable envoyé de Gastern. Puis il se rendit auprès de Jehan et lui fit part de tout ce qui venait de se passer.
— J’irai trouver le baron, répondit le jeune religieux, j’irai seul à Tréhorenteuk, afin de lui arracher sa proie et de lui épargner un crime.
— Mais où trouveras-tu mon fils, la somme que réclame cet ennemi de Dieu ?
— Prions, prions, ô mon père... n’est-ce pas demain la fête de tous les saints ? Les bienheureux du ciel ne nous abandonnerons pas. J’irai à Tréhorenteuk, avec votre permission, pendant que vous célébrerez l’office des morts, et le redoutable baron ne sera plus à craindre.
— C’est Jésus, sans nul doute, qui t’inspire, ô mon fils ; qu’il soit fait ainsi que tu le demandes

Pendant cela, que se passait-il au manoir de Tréhorenteuk ? Le souper, servi dans la salle des gardes, attendait le baron, qui se mit bientôt à table, au milieu de quelques soudards favoris. On avait enfermé le prisonnier dans un réduit obscur attenant à la salle, et là, le supplice le plus cruel du serviteur de Dieu était d’ouïr les propos infâmes, les jurements horribles de ces possédés, qui se livraient à des libations sans mesure. Tantôt des querelles menaçantes semblaient devoir éclater entre ces misérables échauffés par le vin ; tantôt, d’affreuses chansons retentissaient sous les voûtes du sombre manoir. Et au-dehors, l’ouragan déchaîné paraissait lutter par sa violence avec le vacarme croissant de l’intérieur. Les éclairs, qui, pareils aux reflets de l’enfer, illuminaient par intervalles les noires murailles de la grande salle, augmentaient la joie et l’ivresse du sire.

— Holà ! s’écria-t-il, qu’on amène mon chapelain, je veux qu’il boive céans à ma santé. On alla chercher le moine, qui s’avança d’un pas ferme au milieu de la salle. Sa contenance digne et calme, sa figure vénérable, commandèrent un moment de silence. Gastern lui-même se sentit mal à l’aise ; enfin, après avoir vidé d’un seul trait une copieuse rasade, il reprit son insolence accoutumée, remplit jusqu’au bord une coupe énorme, et dit au moine immobile en face de lui : — Or çà, mon brave ermite, il faut que tu goûtes le vin de Tréhorenteuk et que tu me dises ensuite si nous ferons bonne chasse demain et après demain... surtout pour fêter les morts. Allons, sang du diable ! Boiras-tu oui ou non ?

Et comme le châtelain, exaspéré du calme que montrait sa victime, allait s’élancer, le poing fermé, sur le serviteur de Dieu, un violent coup de tonnerre ébranla le castel et cloua le possédé à sa place. Le moine, tombant à genoux, lança contre la muraille tout le vin que contenait la coupe, et l’on vit pendant quelques instants la muraille s’illuminer de reflets sanglants. — À moi Vautour ! s’écria Gastern au comble de l’effroi.

L’aube du jour pénétrait par les hautes fenêtres. Deux soudards entrèrent tout à coup dans la salle, et répondirent ainsi aux paroles du baron : — Le voilà, dirent-ils en déposant à ses pieds le corps inanimé du Vautour, qu’ils venaient de rencontrer au fond d’un ravin.

Gastern ne put se lever le jour de la Toussaint. Un feu intérieur brûlait ses entrailles. Ses valets disaient que le moine l’avait envouté et songeaient déjà à piller le château avant de l’abandonner. Cependant, ils avaient relégué le captif dans un cachot éloigné du lieu de leurs orgies, tant ils craignaient que sa présence ne vienne encore les troubler. Ils passèrent donc, ô horreur ! ils passèrent la soirée et la nuit de la Toussaint à boire, à se quereller, à se battre, sous les yeux même du baron, qui avait voulu qu’on le mît sur un lit dans la grande salle.

Mais voilà que sur les six heures du matin, le sire, en entendant sonner dans le clocher du bourg le glas des trépassés, demanda son cor de chasse et en tira soudain, de son souffle haletant, une fanfare infernale.
— Sang du diable ! s’écria-t-il en se levant d’un bond désespéré, le jour des morts ne passera pas sans que mort s’ensuive... En chasse mes maîtres, et que l’on prenne mes meilleurs limiers.
Et sur les landes de Tréhorenteuk les aboiements de la meute, les cris des soudards, les sons d’un cor sinistre répondaient au son lugubre des cloches qui, dans toutes les chapelles du voisinage, tintaient sans cesse pour les morts.

Et sur la plaine aussi s’avançait tristement un jeune moine, dont le regard, voilé par les larmes, venait de perdre de vue la troupe des méchants qui, oubliant le salut de leur âme et les prières qu’en ce jour de deuil universel chacun doit aux trépassés, poursuivaient avec fureur une pauvre biche aux abois. C’était Jéhan, le neveu du baron maudit.

— Pouvez-vous me pardonner, seigneur ? murmura le religieux en détournant ses regards. Hélas ! hélas ! tant de crimes ont mérité votre juste vengeance.
L’élévation sonnait alors dans la tour et dans l’église du bourg de Tréhorenteuk. Jéhan se jeta la face contre terre à ce moment d’immolation divine et versa des larmes abondantes. Puis il se fit au loin sur la plaine déserte un silence de mort : plus d’aboiements, plus de fanfares, rien que le bruit du vent qui gémissait en courbant les bruyères. Le moine pressa le pas dans la direction que la chasse avait prise. Hélas ! quel spectacle vint frapper ses yeux : une plaine aride et nue, une troupe d’hommes immobiles, une meute arrêtée dans sa course ; au loin seulement, une biche qui s’enfuit.

Et le baron, le terrible seigneur ? Le voilà, gisant sur la terre... Jéhan s’approche de lui, l’interpelle avec anxiété, essaie de le relever. Ô justice de Dieu ! cet homme est de pierre ; ces chasseurs, ces chiens, ces gardes, tout ici est pétrifié ; les cœurs ne battent plus dans ces poitrines de roche... et leurs âmes, leurs âmes, grand Dieu, où sont-elles ? La légende entoure de son ombre mystérieuse les pierres maudites de Tréhorenteuk. Mais, hélas ! n’est-il pas en ce temps d’autres cœurs pétrifiés, d’autres âmes glacées par l’aveuglement du siècle, et pour lesquelles le chrétien ose à peine s’adresser cette question poignante : — Ces âmes, Seigneur, où vont-elles ?




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